J'envoie valser. (F017-210 & F01-702)

D’une démarche faussement naturelle, 702 se dirige vers une chambre qui n’est pas la sienne avec l’espoir un peu idiot sans doute – pour un tas de raisons – de ne pas attirer l’attention sur sa petite personne et principalement sur les curieuses motivations qui la poussent à vouloir s’imposer dans un des espaces de cet étrange lieu le plus susceptible d’être intime et personnel. Dans une autre vie, la jeune femme ne devait pas être douée pour les cachoteries en tout genre à en croire l’air coupable que lui renvoie son propre reflet. A moins qu’avoir connaissance de ses intentions – heureusement, d’ailleurs – ne la rend pas objective. C’est possible mais qu’importe puisque aucun autre numéro ne semble la soupçonner de quoique ce soit qui trouble l’ordinaire de leurs quotidiens habituels ici. Et les personnes derrière les caméras ? Qui sait. Est-ce qu’il y en a, au moins ? La théorie existe mais elle est mitigée. 702 ne sait pas encore comment se positionner dessus mais peut-être que l’issue de cette journée l’aidera à y voir un peu plus clair. Mystère. Cela dépend de ce qui l’attend au cours des prochaines heures. Découverte ou conséquences ? Après plusieurs relecture des règles de vie, 702 est quasiment certaine de ne pas les enfreindre ou alors il est vraiment retords. Et si elle faute, que l’attend t-il ? C’est une autre de ces questions dont elle aimerait trouver la réponse mais une chose à la fois, seulement, elle laisse ce questionnement pour un autre jour. Finalement la jeune femme est assez sereine, assurée, quand elle s’arrête devant la porte du logement où elle a rendez-vous et digitalement imprimés sur sa montre connectée, les chiffres ne mentent pas : elle est à l’heure 702. Comment en aurait-il pu être autrement ? Elle ne peut pas vraiment se vanter d’avoir milles et une activités qui l’accaparent en ces lieux. Et si elle aime parfois se dépenser sur les machines, elle n’en a pas encore développer une addiction au sport, pas au moins d’y passer plusieurs heures tous les jours. Son problème sans doute, c’est qu’elle n’arrive pas à se trouve un passe-temps durable. 702, elle est toujours en quête de quelque chose pour occuper son esprit. Quelque chose qui la passionne vraiment et qui puisse réellement rendre ses journées plus agréables. Mais au lieu de cela, la belle se lasse et va d’activités en activités sans réussir à trouver celle dans laquelle elle excelle. Elle envie un peu ceux qui se révèlent avoir un trait bon coup de crayon ou alors une énergie débordande au point de paraître infatiguables. Pourquoi est-elle de ceux qui errent ?

Une silhouette qu’elle redécouvre avec le sourire, un numéro qui se dessine distinctement dans son esprit, finissent par chasser les interrogations de 702 pour la ramener vers le moment présent. Car malgré ses errances, la jeune femme parvient à jongler habilement pour éviter les temps morts. Ce n’est pas vraiment une prouesse pour autant, car son arrivée ici ne remonte pas tant que cela. Elle a compté, n’a pas encore abandonné son décompte. Elle est ici depuis une semaine. Difficile à croire pour maintes raisons mais pour l’instant elle ne veut plus y penser. Ce n’est pas le moment alors d’un revers de la main imaginaire, la belle chasse ses pensées pour se concentrer sur des priorités beaucoup plus excitantes. « Prête pour l’exploration, 210 ? » qu’elle demande, un large sourire aux lèvres mais toutefois très sérieuse.  Par contre, explorer c’est plutôt pour enjoliver la chose, elles vont surtout fouiller en fait. Très activement. La porte du logement est ouverte, normal, mais aucun numéro ne les attend à l’intérieur, conformément à ce qui était prévu. « On s’occupe de la chambre inoccupée ? » Même si les toutes les chambres se ressemblent et sont globalement vides, certaines sont occupées et c’est ce qui dérange 702. Elle n’aimerait pas qu’on fouille de fond en comble le seul espace qui lui soit un minimum personnel même si rien à l’intérieur ne diffère sa chambre des autres. Mais derrière cette réflexion se cache aussi un soucis de logique. Il y a forcément un endroit caché dans la dernière chambre du logement, par où arrivera tôt ou tard le dernier locataire. Ils ne peuvent tout de même pas apparaître par magie, quand même ? Cette réflexion fait sourire 702, ses pensées tournent en rond. C’est exactement avec cette phrase qu’elle a attiré la veille, l’attention de 210. « On ne ressortira que quand on aura trouver quelque chose ! » qu’elle clame en rigolant mais pas trop non plus. 702 attend sincèrement quelque chose de leurs investigations et pas seulement un moyen de faire passer le temps autrement que par le biais des autres possibilités offertes par les différents coins de l’espace vie. Et sans attendre, la belle se met au travail, les deux mains devant elle pour tâter les murs à la recherche d’un relief suspect.

Cela fait tout juste une semaine que 702 est enfermée dans ce lieu vide de sens, d’un blanc immaculé au point de s’en griller les rétines à trop forcer le regard, et plus les jours passent et plus elle est intimement convaincue qu’il y avait un avant. Elle avait une autre vie avant de s’éveiller sur son lit, dans cet étrange endroit. Maintenant, elle en est convaincue. Les doutes par lesquels elle a pu passer au début se sont volatilisés, laissant place à une évidence. La jeune femme ne semble rien savoir du tout mais son corps sait des choses, à gardé lui des souvenirs qu’elle ignore car il réagit à certaines situations naturellement. Comme si il ne faisait que répéter des mouvements déjà réalisés plusieurs centaines de fois. Puis elle sait nommer des sensations, connaît des mots et comment les placer avec du sens pour former des phrases. Alors elle est arrivée à la conclusion que tous ceux qui sont présents avec elle dans ces lieux, tous autant qu’ils sont ou qu’ils étaient, on leur a effacé leurs souvenirs. Leur mémoire. Leur vie. Mais qui et pourquoi ? Toutes ces interrogations ne cessent de se bousculer dans sa tête mais se heurtent face à un mur. Face à l’incompréhension. Aleksa, 702 a déjà essayer de lui tirer les vers du nez mais cet hologramme ne sert véritablement à rien si ce n’est la mettre sur les nerfs et lui donner envie de lui donner des baffes. Mais cela, ce n’est pas possible. La violence est proscrite ici, mais c’est surtout que la main de la jeune femme n’atteindrait jamais sa cible. Aleksa n’est pas réelle, elle est juste un moyen pour ceux qui les ont collés dans cet infâme endroit de se jouer d’eux, de leur ignorance, en poussant le vice toujours plus loin. Alors 702, elle a ce petit sourire en coin quand elle entend quelqu’un appelle le programme à sa rescousse, comme si il pouvait réellement lui apporter de l’aide, car elle a bien compris que si ils voulaient trouver des réponses, cela ne se ferait que par leurs propres moyens. Peut-être est-ce pour mesurer leur dégré de détermination ? Peu importe si elle doit entrer dans un jeu qu’elle ne contrôle pas, car 702 a soif de réponses. De comprendre. Mais étonnement, la question de son identité n’est pas ou n’est plus sa priorité. Au vu de leur nombre en constante augmentation, on dirait que chaque jour un nouvel arrivant débarque. Mais sans que personne ne sache ni comment ni par où. Cela se fait dans la plus grande discrétion, hors plus ils sont nombreux et plus cela semble impossible de passer inaperçu. Il y a bien des explications à tout cela, des explications qui pourraient se transformer en des portes de sorties pour eux tous. Et la jeune femme est persuadée qu’en sortant de cet endroit, tout deviendra limpide. Les souvenirs reviendront, ou du moins les réponses s’imposeront ce qui revient à peu de choses au même. Alors, une solution : les trouver ces fameux accès qu’on leur dissimule.

Au départ, la jeune femme trouvait cela plutôt inquiétant de se voir forcer de cohabiter avec de parfaits inconnus mais avec le recul, elle trouve que c’est quelque peu réconfortant de savoir qu’ils sont tous dans le même bateau. Qu’elle n’est pas toute seule, surtout. Cela semble avoir une grande importance pour elle bien qu’elle en ignore totalement la raison. C’est une potentielle piste pour se remémorer qui elle est qui n’a pas encore aboutit, peut-être est-ce encore un peu tôt pour espérer récupérer des bribes de souvenirs de son avant ? Se rappeler est une tâche vraiment compliquée en plus d’être fatiguante, heureusement qu’il y a des activités plus simple à mener. Plus simple tant il n’y a pas beaucoup à réfléchir mais plus à agir. Et par là, 702 pense à la fouille qui se profile dans une chambre pour l’instant inoccupée, peut-être ainsi plus propice à leur apporter à des réponses. Car oui, elle n’est pas toute seule pour accomplir la mission qu’elle s’est elle-même confiée. Elle peut compter sur l’aide bienvenue de 210. Une personne avec qui le courant est susceptible de passer, aujourd’hui comme demain. Encore une chose que 702 ne peut expliquer, une énième, mais c’est ce qu’elle a ressenti après leur bref échange de la veille. Elles ont des similitudes, déjà par le fait de ne pas simplement se laisser porter par les événements ni de ne pas faire comme si tout était normal ici. « Je pense qu’on nous a conduit ici. Qu’on nous a déposé sur nos lits. Sinon quoi d’autre ? » On les a forcément amener, et si qui est une grande question, comment en est une encore plus grande. « Je pense à des trappes. » Le genre de truc qui se fond dans le décor à moins d’être très vigilent et très observateur. Alors 702 tâte les murs dans un premier temps puis cogne dessus, prenant en compte les idées de sa compère. Il y a forcément un indice quelque part et elles finiront bien par le dénicher, décidées qu’elles sont à passer la chambre au peigne fin si il le faut. « Est-ce que tu as regardé sous le lit ? Ou dans les placards ? Ce qu’on cherche a du être cacher de façon stratégique, dans un endroit dans lequel on ne pense pas tout de suite à vérifier. » Il y a bien cette porte qu’elle a remarqué dans les parties communes, qui doit forcément être un de ces accès par lesquels quelqu’un ou quelque chose intervient régulièrement mais cela ne doit pas être le seul, sinon elle ou  les autres le verrait bien aller et venir. Même la nuit, pendant qu’ils dorment. Il y en a bien parmi eux qui doivent avoir le sommeil léger et être capable de se réveiller si une présence se faufile en pleine nuit dans leur chambre. Il y a forcément une explication rationnelle à tout cela, mais laquelle ? C’est énervant de ne pas trouver, de ne pas comprendre et d’avoir cette impression constante qu’on se moque d’elle. Elle tape un coup plus fort que les autres sur le mur, est-ce que cela risque d’attirer l’attention ? « Tu penses qu’on risque quelque chose à fouiller ? » Cela serait sûrement une bonne chose, cela voudrait dire qu’en agissant ainsi elles peuvent découvrir un truc qui dérange. « Et les conséquences qu’il peut y avoir en cas d’infractions, t'as déjà pu voir ce que ça donne ? » Est-ce que quelqu’un s’est déjà essayé à tenter l’interdit ? Que peut-on leur faire de plus, de toute façon ? Leur effacer la mémoire ? Il semble que ce soit déjà fait ? Les priver de nourriture ? Ce n’est pas une grosse punition, ce n’est pas comme si ils avaient le droit à des mets d’exception tous les jours.