Il commençait à avoir faim, Javier. Il ne savait pas quelle heure il était, mais il était l'heure de manger. Ca, il en était certain. Il n'avait pas besoin de regarder sa montre pour qu'elle le lui confirme. Courir toute la matinée lui avait suffi pour lui creuser l'estomac. C'était la seule activité qui lui restait. Depuis la destruction par quelques débiles de la fontaine, la plupart des livres avaient pris l'eau, y compris
Le tour du monde en quatre-vingt jours, qu'il avait eu le malheur de laisser traîner par là. Il n'aura jamais abouti à la fin du roman et voilà qu'il se sentait bien con. Et puis, c'était pas comme s'il pouvait demander à quelqu'un ici présent de lui spoiler la fin... Puisque les gens préféraient de se souvenir de bien d'autres choses de leur vie d'avant plutôt que de la fin d'un roman de Jules Verne.
Javier était dépité. Lui qui n'aimait pas lire, il avait enfin trouvé un auteur qui avait su l'accroché. Mais tous les autres histoires de son cher Jules avaient été englouties et étaient désormais illisibles. Il avait tenu à vérifier, juste pour être sûr, et il était allé jusqu'à essayer de feuilleter les livres pour s'en assurer. Il ne lui restait plus que le sport. La seule chose qui arrivait à maintenir son esprit en constant remue-ménage pour trouver une solution et sortir de là. En se dépensant, Javier parvenait à mettre une distance entre l'endroit présent et son questionnement.
Il décida de se rendre dans l'espace repas pour se remplir la panse. Les abeilles vaquaient à leurs occupations. Certains mangeaient à plusieurs, d'autres seuls, tandis que d'autres traversaient l'aire de vie à pied, ou faisaient leur sport dans l'aire sportive. Javier était seul, en tête à tête avec les quatre machines, toutes plus défectueuses les une que les autres. Laquelle choisirait-il cette fois-ci ? Il opta pour la deuxième en partant de la gauche. C'était celle qui lui avait le plus porté chance jusque là. Javier scanna son bracelet et pria pour voir son plateau apparaître bien rempli, facilement. Le distributeur émit un grondement mécanique et aussitôt, il sut qu'il ne pourrait pas manger aussi vite qu'il l'aurait souhaité. Après un long crissement, le distributeur s'arrêta, comme s'il était arrivé au bout de sa tâche. Javier n'en pouvait plus de ces machines de merde. En lui lançant une insulte, il balança un coup de pied violent, puis un uppercut. La machine réagit, clignota, une seconde tout juste, avant de s'arrêter à nouveau.
Javier approcha sa tête de la bouche du monstre.
-Donne-moi ma bouffe ! rugit-il comme l'homme affamé qu'il était.
Le distributeur émit un petit signalement sonore courtois et le plateau fut envoyé tout droit sur la tête de Javier qui tomba à la renverse. Une douleur parcourut son arcade et le plateau s'écrasa au sol dans un fracas assourdissant, la vaisselle se retrouva fracassée au sol et la nourriture étalée partout. Javier sentait tous les regards braqués sur lui et il détestait cette idée. Quand il porta ses doigts là où la douleur se faisait le plus ressentir, il les découvrit en sang. L'arcade sourcilière touchée, celle-ci pissait le sang.
-On va en profiter pour tester cette putain d'infirmerie, marmonna-t'il, profitant de cette occasion pour fuir la tête basse.
Javier mit un instant pour se souvenir de l'endroit de l'infirmerie. Il ne tarda pas à entrer dans l'une des salles et se mit à fouiller les tiroirs, tout sortir pour y voir plus clair, alors que le sang dégoulinait sur son visage, ses bras, ses doigts, et tout ce qu'il touchait par la même occasion. Où étaient ces foutues compresses ? Javier avait mal, faim, honte et était impatient. Il ne pouvait être de meilleure humeur.
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