What the Hell ? ft. Myra

What the Hell

Les bras croisés, tu laisses distraitement ton pouce caresser ton avant-bras tout en te perdant dans tes pensées. Depuis le balcon surplombant les autres pièces de l’endroit, tu réfléchis à tout ce qu’il se passe depuis que t’es tombé de ton lit pour la première fois, il y a quelques semaines ou bien quelques mois. C’est difficile, en toute honnêteté, de garder la notion du temps, sans avoir plus d’indications ou un calendrier pour te guider. Et t’as beau griffonner dans ton carnet, 210, t’es pas suffisamment devin pour obtenir les bonnes réponses à chacune de tes interrogations. Tu soupires, alors, soufflant discrètement alors que tu cherches quelque chose à quoi te raccrocher. T’as des petits bouts d’identité, des indices par-ci par-là qui remontent à ton esprit, mais rien de flagrant. Au contraire de M, ou Myra maintenant, qui semble être plus poussée à se rappeler, toi t’es toujours coincé. T’as toujours cette alliance au doigt qui te rend perplexe, t’es encore le même crétin avec un pseudo à trois chiffres, ayant pour seule suspicion de prénom une foutue initiale. A part ça ? T’as que des références à la con, et ton instinct de fouinard qui te fait agir tel un Sherlock Holmes de pacotille.  Tu glisses une main dans tes poches à cette pensée, frôlant ton carnet gardé précieusement caché. Tel un parfait détective, tu ne pars jamais sans lui, tu es paré à noter tout ce que tu vois, tout ce dont tu es témoin. Tu penses bien que c’est là un vieux réflexe, probablement une révélation sur ton métier d’avant. Pourtant, mon vieux, tu n’es pas encore prêt à tout dévoiler, ni à clamer haut et fort que tu devais certainement appartenir au bon vieux rang de l’autorité. Il faut bien dire que la loi ne semble plus rien signifier, dans le coin, et que même si elle existait avant, elle n’a clairement pas empêché la Ruche de tous vous enfermer. C’est peut-être bien ça qui te retient de vouloir opter pour un surnom plus radical, plus révélateur sur ta personnalité. T’es encore hésitant, tout simplement. Et au final, c’est un peu le comble, pour un homme d’action.

En secouant la tête, tu te détournes, faisant face à la porte de ton logement. Tes lèvres sont mordillées et ton front plissé face à la porte entre-ouverte. Comme l’implique la nouvelle règle, tu n’as pas passé la nuit ici, et c’est la première fois de la journée que tu escomptes franchir le seuil de cette pièce supposée être tienne. Mais on ne va pas se mentir, depuis que tu as eu de nouvelles colocataires, dont une en particulier, tu traînes de moins en moins dans le logement désigné.  Tu ne sais pas vraiment, pour ta défense, comment te comporter avec 991 qui ne cesse de te faire des avances, en dépit de tes tentatives pour la repousser. Tu es gêné, bien que flatté par l’attention portée à ton encontre, et tu sais aussi pertinemment que l’intérêt est quelque peu mal placé. Depuis votre première rencontre, tu dois bien avouer que tu ne sais pas sur quel pied danser avec ta coloc’, souhaitant que tout se passe pour le mieux malgré tout entre vous. Tu te grattes l’arrière du crâne, 210, t’approchant un peu de cette sorte d’appartement, bien que tu demeures toujours à l’extérieur, comme en attente d’une confirmation. De quoi ? Peut-être qu’il n’y ait tout simplement personne à l’intérieur. Mais c’est peine perdue, car rapidement la porte s’ouvre totalement à la volée, et tu tombes nez-à-nez avec celle que tu espérais éviter. Pas parce que tu ne l’aimes pas, encore une fois, simplement parce que tu doutes encore de l’attitude à adopter. Tu as donc quelques pas de recul, par automatisme, comme si tu voulais te décaler pour la laisser passer. Mais consciemment ou non, tu restes droit devant elle. Face à la brune alors, tu esquisses un sourire. Tu crois bien que t’allais la saluer et la frôler pour finalement rentrer dans ta chambre, mais c’est franchement flou, même encore maintenant. Tu sais juste que la femme a refermé ses bras autour de ton cou, se précipitant vers toi pour rompre la distance. T’es pas bien certain de si ses lèvres ont pressé les tiennes ou non, tellement tu as été focalisé sur la surprise, et sur le fait de la retenir alors que son corps entrait en relation avec le tien. Tes mains se sont ensuite relevées en un geste stupide, les laissant immobilisées en l’air, tandis que tes yeux se sont écarquillés. Tu t’es figé, 210, et c’est peut-être bien ce que tu regretteras le plus par la suite. Car si 991 a fini par se décoller de toi, ce n’est certainement pas grâce à ton intervention divine.