Nous avons pris la très difficile décision de fermer le forum en date du 18 octobre 2020. Merci à tous pour ces beaux moments passés en votre compagnie. On vous aime tout plein! <3
Cet étrange alcool violet apparu dans les vestiges de la fontaine est à la fois le plus grand rêve de Rouky et son pire cauchemar. Oui, il a envie d'aller s'y jeter corps et âme, de boire jusqu'à ce qu'il en oublie sa propre existence, y'a quelque chose en lui qui débloque quand il sent l'odeur alcoolisé flotter dans l'air, quelque chose de fort, de presque incontrôlable qui l'appelle à aller abuser du breuvage comme beaucoup d'autres le feront certainement dans la ruche, mais en même temps, y'a une angoisse qui le ronge, presque aussi forte que son envie d'aller boire; la peur du manque. De l'alcool apparu soudainement dans leur prison blanche? Trop beau pour être vrai. Et si c'est bel et bien vrai et qu'il n'y a aucun piège derrière cette offrande, il se doute pourtant que ça ne va pas durer éternellement. Tôt ou tard, ça va disparaitre et il n'y en aura plus et ça, ça lui semble encore plus terrible que de devoir mettre son désir de boire de côté, du moins juste assez longtemps pour lui laisser l'occasion d'agir intelligemment. Certes, ce n'est pas une habitude dans son cas, de réfléchir, mais l'alcool est une motivation suffisante pour qu'il le fasse. Et si tout ça va disparaitre, hors de question qu'on lui enlève de nouveau ce qu'il croit être le bonheur de sa vie, une certitude qu'il tient même sans avoir le moindre souvenir. C'est donc poussé par ce désir de se faire des réserves pour plus tard qu'il contrôle son envie d'aller rejoindre les autres pour faire la bringue. Pas tout de suite, pas avant qu'il ait rempli tout ce qui se rapproche de près ou de loin à une bouteille. Tout y passe, notamment toutes les bouteilles de shampoing qu'il peut trouver, qu'il vide de leur contenu et rince le plus possible avant d'aller les remplir du précieux nectar. Une tâche à laquelle il s'applique avec une certaine concentration, mais non pas sans boire quelques verres ici et là entre ses remplissages de bouteille. Il en oublie pratiquement l'hystérie qui semble s''être emparé des lieux. Il en oublie aussi sa faim, alors que son estomac semble constamment lui rappeler qu'il a brisé son bracelet et qu'il doit désormais se nourrir du reste des plateaux des autres, ou mieux, de ce qu'il récolte de la poubelle. Sauf qu'aujourd'hui, manger n'est pas une priorité. L'alcool est une priorité, faire des réserves et en boire.
C'est donc avec sa première vague de bouteilles qu'il tient précairement entre ses mains et ses bras, tout en essayant de ne pas renverser son verre d'alcool, qu'il revient vers les tables, bifurquant d'abord pour en choisir une entièrement libre, avant que son regard ne tombe sur le visage d'un jeune homme qu'il n'avait jamais remarqué jusque là. Ce dernier, d'apparence plutôt frêle, semble observer le chaos qui règne autour avec une certaine méfiance, voir peut-être carrément un certain traumatisme, c'est difficile de savoir exactement. Rouky hésite alors quelques secondes, avant de finalement bifurquer vers le jeune bouclé, qui pour le coup a l'air aussi jeune que lui, si ce n'est pas encore plus. Le plus naturellement du monde, il s'installe à la place devant lui, pose les bouteilles de shampoing -désormais d'alcool- et plante son regard dans celui du garçon, le scrutant comme s'il le passait au scanneur, mais tout en conservant le silence, question que la situation soit le plus awkward possible. Il arque finalement un sourcil, le toisant toujours. « Tu bois pas? T'es mormon? » Surtout, ne lui demandez pas ce qu'est un mormon, il n'en a pas la moindre idée, ça lui arrive assez régulièrement de simplement dire les premiers mots qui lui passent par la tête sans chercher à savoir. Observant toujours le jeune homme, il pousse alors son verre dans sa direction. « Tu veux boire? » Qu'il ajoute. « Je sais pas si l'alcool s'applique à la règle de non partage, tho. » Mauvaise idée du coup? Ce pauvre gars n'a pas une tête à être préparé à atterrir en prison et se faire torturer. Ne voulant pas prendre de risque, Rouky s'empresse plutôt de ramener son verre vers lui et en boire une gorgée. « Tu me remercieras plus tard, » qu'il ponctue avant de finalement étirer un sourire. « Je m'appelle Rouky, je suis alcoolique. Visiblement. C'est quoi ton dommage à toi? » C'est une façon comme une autre de se présenter et faire connaissance, non?
Des rituels. 07 avait besoin de rituels. Et la ruche avec son quotidien paramétré au poil de cul près (ou presque) convenait parfaitement à notre nouvel arrivant. Cela faisait quelques jours qu'il s'appliquait à suivre les règles comme un bon petit soldat. Du mieux qu'il pouvait. Les quelques bugs qu'il affrontait face aux dysfonctionnements des distributeurs lui donnait bien évidemment des sueurs froides, devoir dormir dans une autre chambre que la sienne était également une rude épreuve. Mais tout rentrait dans l'ordre le matin, lorsque 006 apparaissait dans son champ de vision. Elle était son repère le plus rassurant du monde. Sa première rencontre et la seule personne à qui il osait adresser la parole de son propre chef. Oh, il connaissait les protagonistes de la ruche relativement par coeur. À défaut d'être un grand bavard et de tailler le bout de gras avec eux, il passait la majorité de son temps à les observer. De loin. Très loin. Vivre en huis clos était un défi permanent. Et il se mettait à pied d'oeuvre afin de détecter les plus dissidents d'entre eux pour pouvoir les éviter cordialement. Éviter le moindre risque, le moindre éclat. Depuis son arrivée au sein de la ruche, notre freluquet de 07 n'était pas quelqu'un d'amical. Loin d'être avenant, sa meilleure stratégie était (lorsque la peur ne lui paralysait pas les jambes) la fuite. Quelqu'un tentait une approche inoffensive pour le saluer ? Il se pétrifiait sur place. Quelqu'un lui demandait s'il comptait finir sa purée de pommes de terre ? Il quittait immédiatement la pièce, laissant son plateau en plan pour se réfugier dans sa chambre. Sa chambre. S'il pouvait s'y nourrir directement via un distributeur perso, il y resterait jusqu'à ce que mort s'ensuive...
Les yeux pleins de sommeil, il s'était levé ce matin avec un désagréable pressentiment au creux de l'estomac. Ou bien était-ce la faim qui le malmenait ? Le distributeur ne lui avait offert que sept petits pois et une bébé carotte la veille et ce n'était certainement pas lui qui allait enfreindre le règlement en demandant à 006 un bout de sa délicieuse et croustillante cuisse de poulet. En parlant de 006, il était temps de la retrouver dans l'aire commune pour déjeuner.
Horreur.
À peine le seuil de sa porte franchi, une odeur inhabituelle lui agressa les naseaux. Ça empestait le... - Posté sur le balcon à renifler l'air comme un chien de chasse, il écarquilla de grands yeux effarés - L'alcool ? La ruche avait-elle été désinfectée à grands renforts d'éthanol durant la nuit ? Le bruit suspect de l'eau ne tarda pas à lui révéler la manigance.
La fontaine, violette comme jamais, dégueulait une immonde mixture à torrents. Les membres de la ruche semblaient s'en féliciter. Pas lui. Assis devant son plateau à contempler cette anomalie dans la matrice, 07 triturait ses céréales avec méfiance et anxiété. Rituels. Il avait besoin de rituels. Ce changement de paysage le crispait de la tête aux pieds. Comment faisaient les autres pour être si relax ? Insouciants. Légers. Voilà qu'il y en avait même un qui se faisait tout un stock de ce liquide non identifié avec des bouteilles de shampoing. Fous. Tous tarés. Stupéfait par tant d'inconscience 07 en avait perdu l'appétit. Mais alors qu'il envisageait mentalement un repli stratégique dans sa chambre, le type aux bouteilles de shampoing viola son espace vital en déchargeant ses victuailles sur la table. Peut-être que 07 l'avait fixé du regard trop longtemps et qu'il venait maintenant lui coller un gnon dans la tronche ? Notre maigrichon, déglutit difficilement et s'absorba totalement dans son triturage de céréales. Ne lâchant plus sa cuillère des yeux tout en priant silencieusement pour sa vie. *Change de table, change de table, change de table.* Répétait-il dans sa tête comme un mantra de protection. Mais le type ne changea pas de table. Comble de l'horreur, il s'y installa même. Sans dire un mot. 07 se crispa tant, qu'il cessa tout mouvement. Les yeux toujours rivés sur son bol. Le silence dura une éternité.
Où était 006 quand il avait besoin d'elle ? Diable, il n'était pas loin de se chier dessus, là.
*Ressaisis toi. Lève toi. FUIS BON SANG !*
Par une bravade extraordinaire, 07 leva enfin les yeux, assez du moins pour observer le torse de son assaillant. Eh. Ce gars ne portait pas de bracelet autour du poignet ?! La surprise de cette constatation surpassa sa terreur, si bien qu'il planta ENFIN son regard dans celui de l'énergumène. Oui, notre gringalet avait un peu une tête d'ahuri à ce moment précis. Une expression indéfinissable au visage. Entre terreur et incompréhension.
« - Tu bois pas? T'es mormon? - Co... Comment ? »
Les yeux comme deux ronds de flanc, 07 manqua de s'étouffer dans sa propre salive. Venait-il de pisser un peu dans son slip ? Oui. Et son assaillant, (tout en prenant soin de faire abstraction de l'effet qu'il produisait sur sa victime), ne s'arrêta pas là. Oh non ! Il lui proposa un verre avec un flegme indécent. Tétanisé pour de bon. 07 n'osait plus détourner le regard. Ça fusait à cent à l'heure dans son petit crâne. Il était prêt à hurler.
« - Je sais pas si l'alcool s'applique à la règle de non partage, tho. Tu me remercieras plus tard.»
Son harceleur revint sur sa proposition et bu lui même quelques gorgées. Avec un peu de chance, le liquide violet était un poison fatal ? Toujours paralysé par cette situation inextricable, 07 se sentait défaillir. C'était vraiment pas le moment de tomber dans les vapes. *Ressaisis-toi damn it !*
« - Je m'appelle Rouky, je suis alcoolique. Visiblement. C'est quoi ton dommage à toi? »
ROOKIE !? 07 lâcha sa cuillère dans son bol avec fracas. Il avait déjà entendu parler de ce Rookie ! (qui n'en avait jamais entendu parler en réalité ?) Rookie était célèbre comme le loup blanc au sein de la ruche. Rookie, ou plus communément appelé : le fauteur de trouble ! Rookie le mal en personne oui ! Il mettait enfin un visage sur ce nom diabolique qui hantait ses conversations avec 006. De réputation, s'il y avait bien une personne qu'il s'était promis de ne jamais rencontrer, c'était lui ! Voilà, 07 était maintenant blanc comme une merde de laitier. Bad karma. Désespéré, il regarda tout autour de lui. Toujours pas de 006 pour le sortir de là. Il allait devoir se débrouiller comme un grand.
« - Je. »
"Je" était un bon début.
« - Je. Je ne suis pas un MORMON ! » Cria t-il malgré lui tant sa panique atteignait des sommets. Ce qui attira l'attention de quelques personnes attablées non loin d'eux.
« - J'ai oublié quelque chose ! Euh. Quelque part ! Vers là bas ! A-ADIEU ! »
Oui, il avait oublié ses couilles dans un coffre sous scellés. Ainsi, voulant abandonner son plateau et surtout Rouky, il se leva brusquement avec l'intention non dissimulée de s'enfuir.
Soyons honnête. Rouky n'est pas un tyran, mais Rouky apprécie tout particulièrement cette situation, la terreur sur les traits du jeune garçon. Celui-là même qui se transforme en la concrétisation humaine de tout un tas d'adjectifs; tétanisé, horrifié, pétrifié, terrorisé, paniqué. Et c'est beau, c'est tellement beau. Rouky ne comprend certes pas pourquoi, ce qu'il a bien pu faire pour mettre le gringalet dans cet état catatonique. Est-ce que c'est quelque chose qu'il a dit? Peut-être est-il allergique à l'alcool et qu'il est simplement en choc anaphylactique, qu’importe ce que c'est. Il se demande ce qu'il fera, si par le comble du malheur le jeune frisé hyperventile au point dans tomber dans les vapes. Devra-t-il lui faire la réanimation artificielle? Ou est-ce que ce sera calculé comme une agression de sa part et il aura de nouveaux des ennuies? Des questions qui lui traversent l'esprit, mais rien qui ne l'alarme assez pour qu'il se lève et le laisse tranquille. Non, certainement pas, ça l'amuse beaucoup trop. Pourtant, pas question de se mettre à rire et d'avoir l'air d'un gentil bouffon, il conserve le rôle, sa flegme détachée pour se donner l'air d'être un caïd. Son air amusé, pas trop sérieux, mais assez pour semer le doute sur ses intentions. Puis, il se présente et cette journée déjà carrément excellente -alcool oblige- en devient encore plus magique quand le garçon en échappe sa cuillère dans son bol de céréale. Wohh. Dingue. Est-ce que c'est lui qui lui fait tout cet effet? Est-ce qu'il est à ce point devenu célèbre chez le peuples effrayés de ce centre de concentration?
Toute couleur semble quitter le visage du jeune homme déjà bien blafard et Rouky étire son sourire, résolument satisfait de son petit numéro involontaire, car non, il n'était pas venu avec l'intention de le terroriser, mais maintenant qu'on lui offrait l'occasion sur un plat en or, il était difficile de passer à côté. Nul besoin d'intervenir pour l'instant, il se contente de regarder le frisé se torturer lui-même avec ses propres pensées et c'est un spectacle des plus fascinant pour Rouky. « - Je. Je ne suis pas un MORMON ! » Le temporairement-brun hausse légèrement les sourcils avant de laisser glisser un léger ricanement. « Oh bah tant mieux pour toi hein. Y'a plus rien qui t'empêche de boire maintenant. » Tout s'arrange pour le mieux, non? Non. Puisque sa petite victime adorable semble sur le point de se sauver comme un véritable chevreuil. Rouky arque un sourcil, le regardant se redresser soudainement. « - J'ai oublié quelque chose ! Euh. Quelque part ! Vers là bas ! A-ADIEU ! » Adieu? No, not today. Il vient juste d'arriver et il n'en a certainement pas fini avec lui déjà. D'un mouvement presque lâche, il se redresse à son tour, posant une main sur la table pour s'appuyer et se pencher vers l'avant au-dessus de celle-ci, jusqu'à agripper le tissu de la chemise du jeune fuyard de son autre main. Il secoue légèrement la tête, faisant claquer sa langue d'un son désapprobateur. « Non, tu pars pas tout de suite Bambi, on vient juste de faire connaissance toi et moi. » Il tire légèrement sur la chemise pour le faire se rassoir, mais sans être brusque pour autant, aussi bien le garder en vie le plus longtemps possible. « Tu peux respirer aussi, ça m'embêterait que tu clamse et que je sois obligé de te faire le bouche à bouche parce que je suis pas certain d'avoir déjà passé le cours de secourisme. » Il sourit, rigole de nouveau devant la tronche que tire son nouvel individu préféré de la ruche. « Pourquoi tu veux partir, tu veux pas qu'on soit pote? Je suis gentil moi, je t'offres de la booze et c'est comme ça que tu me remercies? » Sérieusement, est-ce possible de mourir de peur, genre réellement? Si c'est le cas, peut-être qu'il devrait faire un peu plus attention, la quantité de sang dans l'organisme de ce petit gars semble baisser à vue d’œil et c'est un peu dangereux pour le cœur. « Non sérieusement Bambam, je suis un gentil, faut pas que tu crois ce que les gens disent, si c'est à cause de la fontaine que t'as peur de moi, c'était un gros malentendu. » Un accident, ça arrive les accidents, ça arrive même souvent que des objets explosent sous des coups de marteaux accidentels.
Lorsque rouky se penche vers lui pour lui agripper la chemise, 07 a déjà un pied fuyant. Son sang se glace. Et alors, le temps s’arrête. Des sensations sans queue ni tête lui reviennent comme un feu d’artifice du 14 juillet. Des flashs. Des certitudes invasives. On lui a déjà volé son déjeuner plusieurs fois. On l’a déjà attrapé par le paletot pour lui soutirer du fric. Ou bien ? Il ne se souvient de rien en réalité, cela ne lui est pas arrivé ici, pas dans la ruche. Ailleurs ? Où ? Quand ? Qui ? Pourquoi ? Peut-être affabule t-il. Peut-être que son imagination lui suggère des choses insensées. Mais damn, ce qu’il est en train de vivre à ce moment précis ne lui parait pas étranger. Loin s’en faut. Sans savoir pourquoi exactement. C’est juste, si familier. Ce danger. Et c’est peut-être la première fois qu’il a cette sensation depuis son réveil douloureux. Cette impression de déjà vu. Ou plutôt, de déjà vécu. Il est paralysé notre gringalet. Rouky lui fait bien plus qu’une forte impression. Il est un déclencheur. Le trouble s’empare de 07 aussi violemment qu’un coup de fusil. Il se laisse faire. Se rassoit gentiment sans opposer de résistance. Ses jambes flageolent comme des spaghettis trop cuits. Il est même bien trop choqué pour tiquer sur le fait qu’on vient de l’appeler Bambi. Bambi ? Ça lui dirait peut-être quelque chose s’il n’était pas en train de batailler avec ses morceaux de mémoire brisée.
« - Pourquoi tu veux partir, tu veux pas qu'on soit pote? Je suis gentil moi, je t'offre de la booze et c'est comme ça que tu me remercies? »
P.O.T.E ? G.E.N.T.I.L ? Il rirait nerveusement s’il en était capable. Mais force est de constater que Bambi peut juste pleurer sa mère actuellement et écarquiller de grands yeux terrifiés. Boire le poison fatal, (ou cette bouse, comme dirait l’autre) pour mettre un terme à sa tachycardie de hamster lui paraitrait presque être une bonne idée. Est-ce que Rouky le laisserait tranquille s’il buvait une gorgée de ce liquide violet douteux ? Perhaps. Il est confus 07. Il prie en son fort intérieur pour que quelque chose ou quelqu’un vienne le sortir de là. Il regarde tour à tour son plateau avec les vestiges d’un petit déjeuner interrompu. Les bouteilles de shampoing. Le torse de rouky. Son poignet sans bracelet surtout. La fontaine suspecte qui dégueule son affreux breuvage sans discontinuer. Il cherche de son regard de chien battu une abeille qui aurait assez de compassion pour intervenir. Il faut croire qu’il ne s’est pas fait assez d’amis ici pour qu’on vienne le sauver des griffes du voyou qu’il a en face de lui.
« - Non sérieusement Bambam, je suis un gentil, faut pas que tu crois ce que les gens disent, si c'est à cause de la fontaine que t'as peur de moi, c'était un gros malentendu. »
Était-ce. Une. Menace. Déguisée ? Alors là, bien que totalement intimidé et la queue entre les jambes, 07 n’allait pas avaler ce bobard sans rien dire. Tout le monde accusait Rouky pour la fontaine. Et tout le monde c’était 006 en fait, vu qu’il ne parlait qu’à elle. Mais bref elle en savait bien plus que lui sur les affaires de la ruche. Alors, il respire un grand coup pour ENFIN exprimer le fond de sa pensée ! L’esprit de 006 est avec lui ! Il rassemble tout son courage et :
« - Je ne voulais pas vous regarder de travers tout à l’heure ! Je n’ai absolument pas jugé votre façon de remplir les bouteilles de shampoing ! Juré ! Enfin ! Je me suis peut-être dit que c'était dangereux ? Je suis désolé, ne me faites pas de mal ! Ne me jetez pas dans la fontaine ! »
Sa voix tremble malgré lui. Il se confond en excuses, ça le rend pitoyable, il se liquéfie. Mais une fois lancé il a du mal à s’interrompre.
« - Pitié ! Laissez moi partir ! Ok ! Je veux bien boire une gorgée de votre bouse ! Mais je vous en conjure, ne me frappez pas ! Je vous donne mes céréales ! Même si je dois être puni ! Pas TAPER ! »
Liant le geste à sa parole, 07 pousse maladroitement et vivement son plateau vers son Bully. Et comme dans une partie de bowling sous le coup de la chance, il commet un strike. Les bouteilles de shampoing valsent par terre. C’est la crise. 07 se jette à plat ventre sous la table pour les ramasser sans attendre. *omg, omg, omg, JE SUIS STUPIDE ! IL VA ME BUTER !*
Dire que ça ne l'amuse pas, ce serait mentir. C'est vrai, de voir ce pauvre petit gars au bord de l’apoplexie, c'est marrant. Ça l'est parce que ce n'est pas fondé selon Rouky. Il n'est ni une brute, ni quelqu'un de terrifiant. Il ne comprend d'ailleurs pas trop le pourquoi du comment derrière cette peur irrationnelle que le frisé semble avoir vis-à-vis de lui. Au dernière nouvelle, il a causé des problèmes à la ruche, et à lui directement, mais jamais il ne s'en est prit directement à quelqu'un. Ou du moins, jamais autrement que de façon bien inoffensive. Embêter, emmerder, énerver, oui. Brutaliser comme un minable bully, certainement pas. Et cette situation, maintenant, quand il attrape le garçon par la chemise pour l'empêcher de partir et le rassoir, est-ce que ça fait de lui un bully? Bonne question. Si c'est le cas, il va devoir rétablir les faits. Il ne souhaite pas être important dans cet habitat qu'est la ruche, il ne souhaite pas être craint non plus. Ceci dit, peut-être n'a-t-il pas bien choisi ses mots. Bon non, en toute franchise, il a fait exprès de les choisir, question d'avoir l'air mécontent, de lui donner l'impression qu'il n'apprécie pas sa réaction alors qu'il essait de se montrer sympa et qu'il lui offre même de l'alcool. Il fait exprès parce que l'effrayé ne marche pas, il court, il semble acheter tellement vite l'idée que le rouquin est là pour la martyriser que ça en devient comique. Ultimement, ceci dit, il va revoir sa tactique pour le rassurer. Ce n'est pas mal de s'amuser un peu, n'importe qui d'autre aurait fait pareil, ne prétendez pas le contraire. Rouky ne le quitte pas des yeux, le sourire ne quitte pas ses lèvres. Il l'observe, analyse les traits en détresse de son visage pâle, porte attention à ses tics nerveux, son rire chancelant, ses regards furtifs comme s'il cherchait à attirer l'attention d'un quelconque sauveur. C'est bizarre, oui, il trouve ça très bizarre le rouquin devant lui. Il ne peut toujours pas comprendre comment on peut avoir peur de lui, lui, le Rouky qu'on ne prend pas au sérieux, le petit con écervelé.
« - Je ne voulais pas vous regarder de travers tout à l’heure ! Je n’ai absolument pas jugé votre façon de remplir les bouteilles de shampoing ! Juré ! Enfin ! Je me suis peut-être dit que c'était dangereux ? Je suis désolé, ne me faites pas de mal ! Ne me jetez pas dans la fontaine !» « - Pitié ! Laissez moi partir ! Ok ! Je veux bien boire une gorgée de votre bouse ! Mais je vous en conjure, ne me frappez pas ! Je vous donne mes céréales ! Même si je dois être puni ! Pas TAPER ! » Il arque d'abord un sourcil sous cet avalanche de mots et de supplications, entre perplexe et amusé, puis reste un peu médusé quand le frisé pousse tout à coup son plateau vers lui, faisant un score presque parfait avec ses bouteilles par la même occasion. Tout ça avant qu'il ne plonge littéralement vers le sol pour les récupérer, au bout de sa vie. Quel drôle de numéro ce garçon tout de même. Il l'aime bien. Avec son flegme habituel, il secoue légèrement la tête, puis quitte sa chaise pour aller le rejoindre au sol, ramassant lui-même une bouteille. « Déjà, te jeter dans la fontaine ce serait un peu compliqué parce que y'en a plus. Et je vais pas te jeter dans l'alcool, ce serait du gaspillage et pas super hygiénique. » Il marque un temps, plisse légèrement les yeux. « Pas que t'es sale hein, juste...on se comprend. Ta mère t'as surement déjà dit de pas te baigner dans le même verre où tu bois. » Non? Non. Probablement pas. Sa mère ne lui a probablement jamais dit ça non plus, il n'en sait rien, mais ça lui semble un peu approximatif comme conseil de vie. Ceci dit, adapté à la situation, très certainement. « Puis t'as bien le droit de me juger si tu veux, je remplis des bouteilles d'alcool pour me faire des réserves. Personnellement, je trouve ça malin, mais chacun sa façon de survivre hein. » Il sourit de nouveau dans un léger rire. « T'es pas obligé de boire et tu peux garder tes céréales, ce serait une infraction et si j'en juge par la tête que tu tires, t'es pas taillé pour la prison. T'es pas taillé pour grand chose peut-être même. » L'humble vérité, rien de plus, rien de moins. « Faut que tu respires un peu, je vais pas te frapper, ni te tuer. » Ça aussi, c'est la vérité. « Tu peux rester sous la table aussi si ça t'arrange hein, moi j'ai rien d'autre à faire d'toute façon, dessus, dessous, assit ou couché, tout me va. » Ha ha! Il se trouve drôle. Oui. Même pas honte.
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