(f03-404&f03-806) i need somebody. help!

D’abord, il n’y avait rien. Le noir total et l’absence de bruit. Une quiétude agréable, mais aussi le calme avant la tempête. Elle était si bien, ne pensant à rien, sans vraiment avoir conscience de son corps. Elle volait. Non, elle nageait. Ou bien elle nuageait ? Était-elle vraiment là ? Attendez. Pourquoi tout devenait flou d’un seul coup ? Elle se perdait elle-même, elle s’oubliait. Elle avait beau courir après… Après quoi d’ailleurs ? Ça y est, il n’y avait déjà plus rien.

Boum Boum, boum boum. C’était son cœur, il battait de plus en plus vite, de plus en plus fort, si bien qu’il l’a réveilla. Elle ne supportait pas ce bruit, ni l’effet qu’il avait sur elle. Elle suait, avait le souffle court, se retournait dans son lit mais ça ne servait à rien. Elle poussa les draps de ses pieds avec colère, sans arriver à se maîtriser. Elle ne se rendit compte qu’elle était dans le noir qu’une fois que la lumière aveuglante l’obligea à refermer les yeux. Tout autour d’elle, des murs beaucoup trop blancs qui accentuait le coté éblouissant des spots au plafond. Ça y est. C’était la panique ! Elle chercha dans sa mémoire mais c’était le noir total. Son nom, sa vie, sa date de naissance et de fait son âge… Tout avait disparu. Comment était-ce possible ? Qui était-elle ? Et pourquoi diable avait-elle si mal partout ? Elle regarda ses mains avant d’y blottir son visage. Elle n’était plus qu’une carcasse vide. Elle fondit en larmes. « Bon matin F03-806. Il est 6h du matin, votre pression est élevée ce matin et je vous recommande donc quelques grandes inspirations avant de sortir du lit. Votre pourcentage de vitamine c n'étant pas optimal, du jus d'orange vous sera servis lors du repas. N’oubliez pas d'enfiler des vêtements propres avant de sortir et je vous souhaite une bonne journée. » Mais qu’est-ce que c’était que ça encore ? Cette voix avait eu le mérite de la sortir de sa torpeur. Elle entendit le son de la sienne comme pour la première fois. « Y-a quelqu’un ? » Elle sauta du lit, le cœur au bord des lèvres et prit la direction de la porte. Des canapés, d’autres portes, l’heure qui défilait, la tête commençait à lui tournait. La salle de bain. Des toilettes. De la gerbe. Putain. Machinalement, elle alla se rincer le visage, elle s’essuya la bouche d’un revers de bras en se regardant dans le miroir. Nouvelle sueur froide. Elle avait plusieurs petits bleus sur l’avant-bras et après inspection, elle en avait un peu partout sur tout le corps, plus ou moins gros, de différentes couleurs. La panique s’empara à nouveau d’elle, cette fois, elle se sentait en danger. Lui avait-on fait du mal ? Était-ce ceux qui l’avait enfermé qui l’avait maltraité de cette façon ? Elle perdit le peu de contrôle qui lui restait et commença à fouiller partout autour d’elle dans la salle de bain, le salon, la chambre, sous le lit, dans les tables de chevet, dans la commode…Plusieurs chemises, shorts, sous-vêtements, elle balança tout par terre. Elle ne savait même pas ce qu’elle cherchait. Elle s’agitait, elle brassait de l’air, elle paniquait, ce qu’elle faisait ne servait à rien. Elle fonça vers la seule porte différente, il fallait qu’elle sorte. Mais quoi ? Elle était enfermée ! « AU SECOURS ! » Elle se mit à crier. Pourquoi cette porte ne voulait pas se pousser ? « A L’AIIIIIDE ! » Elle frappa de toute ses forces, elle hurla jusqu’à sentir ses poumons bruler. « JE SUIS COINCÉÉÉÉÉÉÉÉE !!! » Elle s’acharna jusqu’à se faire de nouveaux bleus.

Elle ne désespérait pas et continuait de s’arracher la gorge dans le but qu’on vienne la sauver de…De quoi en fait ? Une prison ? Un asile ? Et ce sentiment de vide qui ne la quittait pas, évidemment, elle ne se souvenait de RIEN. Un petit grincement, une légère vibration, la porte semblait bouger. C’était ce qu’elle voulait à tout prix, mais la peur l’envahit soudain. Et si on venait finir le travail ? Peut-être qu’on était venu la tuer… Elle s’arrêta net, fit un pas en arrière et cessa même de respirer l’espace de quelques secondes ; le moment était suspendu dans le temps, vivait-elle ces derniers instants ?

La porte coulissa pour laisser apparaître une jeune fille blonde plus grande qu’elle. Les traits fins de son visage et son doux regard lui firent comprendre qu’elle n’était sans doute pas une menace. Elle pouvait à nouveau respirer. Elle suivit des yeux l’une des mains de la jeune fille qui vinrent se poser sur ses épaules avant d’essayer de la calmer avec des phrases rassurantes. Elle se méfiait un peu, d’où sortait-elle ? Peut-être qu’elle n’était pas seule dans cet endroit. Elle tenta un rapide coup d’œil derrière la blonde, pour voir ce qu’il y avait de l’autre côté de la porte mais de là, elle ne voyait rien, ni personne. A son tour, elle examina ses mains et ses bras avec une petite moue, comme si elle n’avait pas déjà assez de bleus comme ça. La blonde l’incitait à la suivre, ce qu’elle fit car même si elle n’avait pas confiance, la femme devant elle était la seule à pouvoir lui dire ce qu’il se passait.

« Merci. » lâcha-t-elle timidement quand elle fit couler de l’eau froide sur les bleus. Elle se rendit compte de sa douleur quand celle-ci passa avec la fraîcheur du liquide. Tous dans la même galère… Ça veut dire qu’elle n’est pas seule. Rassurant ? Pas vraiment non. Elle plissa les yeux, cet endroit était de plus en plus étrange. Et sans qu’elle puisse s’en débarrasser, une boule s’était nichée au fond de sa gorge. Elle avait beau déglutir, elle ne voulait plus partir. 404. Elle s’était présentait en utilisant un nombre, c’était nouveau ça. Mais c’était quoi ce bordel ? Et elle ? Elle n’avait pas de prénom. Elle chercha dans sa mémoire et se souvint de la voix et de son discours : F03-806. Ah ça elle s’en rappelait hein ! « F03-806. Enfin… je crois. » Quelle horreur. Elle retira ses mains de l’eau avant de fermer le robinet. Elle avait des tonnes de questions mais par où commencer ? « Qu’est-ce qu'il se passe ? Je veux dire, je me souviens de rien. Qu’est-ce qu’il m’arrive ? » lui demanda-t-elle en s’essuyant les mains. Après une brève inspection des lieux, elle se sentit rougir en voyant le bordel qu’elle avait foutu ; tous ses vêtements traînaient par terre. Si on pouvait appeler ça des vêtements hein… ça lui faisait surtout penser à des pyjamas. 806 entreprit de tout ramasser et de tout remettre dans la commode. Ce qui était étrange, c’était que la jeune fille n’était pas dans le même état de panique qu’elle. « Tu venais d’où, là ? » Ben oui, c’était une complice, c’était obligé. Elle ne pensait pas rationnellement. Pourtant avec son visage de poupée, 404 n’avait pas une once de noirceur dans le regard.

Bienvenue. C’était ironique, c’est certain. Très attentivement, 806 écoutait les explications de la blonde, elle était pendue à ses lèvres, elle allait tout comprendre, savoir pourquoi elle était là et quand elle allait sortir mais ce qu’elle entendait ne lui donnait pas plus de réponse. Tout le monde ici était aussi paumée qu’elle et ça lui faisait peur. Dans quoi l’avait-on lâché ? Elle posa les mains sur le haut de sa tête, la tension retombait petit à petit, un mal de crâne commençait à s’installer. Toute cette histoire ne présageait rien de bon.

80 personnes c’était pas rien, pensa-t-elle en ramassant une chemise. « Nan mais, j’étais paniquée… » lui répondit-elle pour essayer de justifier le foutoir qui régnait dans la chambre. Et qui gérait tous ces gens ? Il y avait des règles, ça elle l’avait bien compris. Mais en cas d’infraction, qui venait les punir ? Il devait bien y avoir des complices, des personnes qui jouaient double jeu, non ? Quand 404 prononça les mots viandes fraîches, elle s’arrêta de bouger – et de respirer par la même occasion – elle la regarda dans les yeux, la blonde restait de marbre. 806 ne savait pas si c’était du lard ou du cochon, allait-elle lui sauter dessus ? 10 secondes, c’était long. Elle éclata finalement de rire et la brune se détendit avant de lâcher un petit rire nerveux : c’était pas vraiment le bon moment pour lui faire des blagues vu l’état d’affolement dans lequel elle se trouvait. Nan mais 806 ne pouvait pas lui en vouloir, 404 essayait tant bien que mal de détendre l’atmosphère, elle voyait bien qu’elle faisait de son mieux pour la rassurer avec ses mots doux et consolateurs.

Et puis, elle n’avait pas tort la petite – enfin la grande. Elles étaient vivantes. Mais 806 ne savait pas ce qui l’attendait et c’était ça qui l’effrayait, l’inconnu. « Comment être sûre que je ne suis pas un monstre ? Si ça se trouve, j’étais une femme dangereuse ! J’ai peut-être du sang de meurtrière et toi tu as pu être une voleuse ! » lâcha-t-elle en s’asseyant comme une grosse patate sur le lit. Elle baissa la tête et se rappela ses marques violacées sur tout son corps. « Toi aussi tu t’es réveillée avec des bleus ? » lui demanda-t-elle d’un ton plus sérieux. 404 avait l’air d’avoir déjà pris pas mal de recul sur la situation, impossible qu’elle se soit réveillée ce matin comme 806. « Tu es là depuis longtemps ? » Elle avait encore des tonnes de questions à lui poser, mais sans doute qu’elle n’aurait pas les réponses escomptées. Pourquoi des numéros de matricules ? Pourquoi toutes ces règles ? Et les conséquences d’une infraction ? Est-ce qu’il y avait un dehors ?