Des histoires de fantômes -66-

C’était peut-être la deuxième où la troisième journée qu’elle était ici. Elle n’était pas certaine puisque la première avait été étrange. En fait, son éveil était hors de l’ordinaire puisqu’elle ne se rappelait en rien sa vie passée. Quand elle s’était décidée à sortir, tout le monde était animé. Il semblait avoir des blessés de la veille lorsqu’elle n’y était pas. Elle avait été chercher son repas dans le laps de temps qu’on lui avait expliqué. Elle avait essayé de faire le point dans sa chambre pour le restant de la journée. 66 avait eu beau essayer, elle n’y était pas parvenue. Rien. Comme si quelqu’un avait pris le livre de sa courte vie et l’avait mis au lavage. Elle savait encore les rudiments, mais aucun souvenir.

Les banalités de la vie quotidienne, comme choisir ce qu’elle mangerait pour déjeuner, n’hésitaient plus. Elle fronça les sourcils en regardant son cabaret.  Est-ce qu’elle avait fait une bêtise dans son autre vie pour être ici ? Même habit pour tous, repas et rythme de la journée imposés, cet endroit avait des aires de prison. Elle s’éloigna de la machine pour laisser la prochaine personne passer. Elle regarda son cabaret avec peu d’appétit. Il était vrai que depuis son réveil, elle n’avait pas vraiment faim. En regardant la salle, 66 aperçut une jeune femme qui mangeait tranquillement. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle ressentait quelque chose. Elle ne savait pas ce que c’était. Elle haussa les épaules et se dirigea vers sa table.

Elle prit place en face d’elle. Son interlocutrice la regarda avant de lui lancer un oui interrogateur. « Salut, comment tu t’appelles ? » répondit-elle simplement.  Elle prit sa fourchette pour commencer à jouer dans sa nourriture. Elle te répondit qu’elle n’entendait pas, mais que vous pouviez communiquer par écrit ou si tu articulais bien. C’était étrange, mais pas surprenant, de croiser une personne sourde. 66 déposa sa fourchette. Elle ne savait pas comment c’était possible, mais elle tenta de parler avec des signes. Elle n’y réfléchit pas trop puisqu’elle ne comprenait rien des dernières journées. Une chose de plus ou une chose de moins, ne ferait pas la différence. «  Salut, je t’ai demandé comment tu t’appelles ou en fait … appelé à ton réveil ? » Demanda-t-elle avec ses mains. Elle n’était pas certaine de l’exactitude de ses signes. Cependant, lorsque la jeune femme te répondit enfin, 66 était à présent certaine qu’elle pouvait communiquer avec le langage des signes.