Jusque là les choses ne se présentaient pas trop mal. J'avais pu sortir de la chambre, et mieux encore, du petit appartement. Ce qui m'inquiétait le plus, c'est que j'avais beau fouiller ma mémoire, je n'en tirais absolument rien. Aucun souvenir de cet endroit, ni même de qui je suis. Pour le moment, les seules informations que j'ai sur moi-même sont les suivantes :
- Je suis un homme,
- J'ai les cheveux bleus malgré quelques racines noires qui repoussent,
- J'ai des tatouages sur le cou, le bras et la main gauche.
Même les vêtements que j'avais trouvé dans le placard de ma chambre ne me disaient rien. Et cette douleur ... Ma tête était sur point d'exploser tandis que mon corps peinait presque à avancer. Ma respiration, elle, ne semblait pas vouloir se calmer, je faisais sans doute une crise d'angoisse. Quoi de plus normal après s'être réveillé dans un lieu totalement inconnu sans aucun souvenir, pas même son nom.
"H04-322" ... La voix dans ma chambre m'avait appelé comme ça. C'était plutôt dégradant. Je n'avais certes aucun souvenir, mais je sentais au fond de moi qu'un être humain devait être appelé par un nom, et non un numéro. Les numéros, c'étaient pour les expériences ou, malheureusement, pour les victimes de déportation ... Or, je pensais savoir ne pas vivre à l'époque du régime nazi, puisque quelque chose me disait l'avoir étudié comme un fait passé et révolu. Restait l'expérimentation.
Dans ce long couloir d'une blancheur éclatant, mur comme lumière, je sentais une odeur parfaitement aseptisée, comme si l'on venait de récupérer chaque recoin avec de la javel. Aucune décoration, comme dans ce que j'imaginais être ma chambre. A bien y réfléchir, l'endroit ressemblait grandement à un hôpital, si ce n'est l'absence de matériel médical. Voyons, réfléchis ... Qu'est-ce que tu ferais dans un hôpital qui n'en ai pas un ? A cette pensée, une idée effleura mon esprit. J'étais peut-être dans un asile. Suite à un accident, j'avais dû perdre la mémoire. J'étais donc soigné ici le temps de me remettre sur pied. Bien que cela m'apparaissait comme la seule idée plausible, j'avais du mal à y croire. Une fois de plus, le manque de matériel médical me faisait douter.
J'arpentais le couloir en frôlant les murs, la respiration lourde et difficile. J'avais beau regarder autour de moi, absolument aucun indice ne s'offrait à moi. Puis tout à coup, je l'aperçu. Au détour d'un couloir, sa silhouette se détacha de l'ombre, marchant là, au milieu de ce blanc aveuglant. Il devait faire environ ma taille et portait les mêmes vêtements gris que moi. Peut-être un autre patient ?
Un regain d'espoir me poussa à aller lui parler pour essayer de comprendre. Je ne savais pas si le garçon parlait ma langue, si il était parmi le personnel ou comptait comme un patient, mais il fallait que je lui parle pour tenter de remettre mes idées en ordre.
Je me rapprochais et lui fis un signe de la main pour retenir son attention.
- Hey, excuse moi de te déranger ... Tu .. tu sais où on est ?
Sans doute pouvait-il lire la détresse dans mon regard. Je devais faire peine à voir, tout paniqué que j'étais. Mais tant pis pour mon égo ou pour mon amour-propre, il fallait que je sache de quoi il en retournait.
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