Le premier jour de cette nouvelle vie |+| Echo

Le premier jour de cette nouvelle vie

Echo + F09-613

La mémoire fait partie de notre être : oublier, c'est mutiler son âme, c'est dessécher son cœur ; oublier c'est cesser d'être homme. Henri-Frédéric Amiel

Les yeux à peine ouverts, elle se rend compte à quel point sa bouche lui semble pâteuse, sèche. Se redresser lui demande un effort considérable et son corps lui fait comprendre son désaccord. La douleur est là, présente dans chaque parcelle de son corps et quand la lumière s'allume brusquement sur cette pièce blanchâtre, c'est pire encore. Comme si son corps avait été en sommeil trop longtemps, elle pousse un grognement mécontent. Elle fouille sa mémoire pour savoir ce qu'elle a bien pu faire le soir d'avant pour en être rendue là et… rien. Ni des jours précédents, ni même sur qui elle est ! Elle se bouche les oreilles quand la voix résonne dans la pièce, tentant de limiter toutes ces sensations intrusives qui ne font que davantage la perturber. Elle tente, quand elle sent sa vision s'adapter, d'observer les alentours mais rien de ce qui l'entoure ne semble éveiller quoi que ce soit de familier. Est-ce qu'elle a perdu la mémoire suite à un trauma crânien lié à un accident ? Après tout, elle se sent terriblement mal, avec des nausées et plusieurs douleurs. Et ce froid, c'est comme si être malade… Il faut qu'elle en ait le cœur net mais à peine veut-elle se lever qu'elle s'écroule comme une masse sur ses deux genoux, se retenant moyennement de ses mains puis ses bras. L'élancement se propage violemment lui faisant serrer les dents. D'abord, elle lui faut s'adapter physiquement.

Finalement, elle reprend contrôle de son corps et va ouvrir la porte de cette chambre et s'en extirper, avant de chercher dans ce semblant d'appartement, une salle d'eau. Se rincer le visage, boire de l'eau, lui fait du bien immédiatement. C'est un peu mieux. Elle pose les yeux sur le miroir. « Même mon apparence ne m'est pas familière. J'ai l'air si… » Qu'importe, l'essentiel est de comprendre pourquoi aucun souvenir ne refait surface alors qu'après vérification aucune blessure qu'elle possède de visible ne semble récente. Pas la moindre plaie non plus sous sa chevelure, ou de douleur prononcée. Un choc émotionnel violent alors ? Il va lui falloir des réponses et ça commence avec cet endroit, par ces vêtements dont les couleurs passives ne lui plaisent absolument pas, qui ressemblent davantage à ce qu'on porterait dans un lieu comme… plusieurs exemples lui viennent à l'esprit et elle ne sait pas vraiment quoi en penser pour le moment. « Il faut que je sorte de cet endroit ! » mais comment deviner quelle porte correspond à la sortie ? Coup de chance, elle tombe dessus rapidement.

Elle se précipite presque à l'extérieur du logement, ressentant immédiatement une once de déception à la vue de tout ce blanc. Encore. Toujours pas la moindre étincelle de souvenir qui fourmille dans son esprit. Elle s'avance un peu pour regarder en contrebas. Ce qu'elle voit ressemble à un espace empli de canapé, de chaises et de tables. Il ne lui reste qu'à descendre, à rejoindre la zone construite comme un lieu de vie commun et trouver la sortie. C'est illusoire mais, c'est une note d'espoir. Elle se remotive et se retourne brusquement pour rejoindre les escaliers vu plus tôt mais elle fait à peine deux pas qu'elle heurte de plein fouet une silhouette et l'agrippe instinctivement pour ne pas perdre son équilibre. Ses muscles ne sont pas encore totalement remis. Il faut qu'elle fasse fonctionner ses neurones correctement : c'est évident que cet endroit n'est pas vide de monde. Cette maladresse de sa part la fait rire, car soudainement, la pesante atmosphère de ce lieu lui paraît amoindrie par cette présence humaine. « Pardon, j'espère que je t'ai pas fait mal…  je regardais pas devant moi. » avoue-t-elle sans vraiment s'en cacher. Elle se retient néanmoins d'harceler cette personne avec toutes les questions qui lui trotte dans la tête depuis son éveil. Une impolitesse à la fois ! Même si la situation dans laquelle elle se trouve, explique peut-être pourquoi elle n'a toujours pas lâché son emprise.