All I know is a door into the dark - ft. H02-22

「 all i know is a door into the dark 」

How terrible this darkness was, how bewildering,
and yet mysteriously beautiful

Il avait été plutôt surpris d'entendre Aleksa lui annoncer la nouvelle règle en vigueur dans la Ruche, vaguement inquiet quand il en avait eu la confirmation sur le petit écran. Il venait à peine d'arriver, et déjà il devait abandonner le peu qu'il connaissait. Les visages presque familiers - bien qu'il les ait au final peu croisés - des deux autres qui partageaient son logement. Mais c'était la nouvelle règle et il devait la suivre, et le reste de la journée était passée aussi tranquillement qu'à l'accoutumée, se laissant bercer par sa petite routine bien huilée jusqu'à ce que le changement lui sorte de l'esprit sans qu'il le remarque - et malgré les nombreux rappels au plafond. C'étaient les premiers mouvements précipités vers l'escalier captés dans un coin de son champ de vision qui l'avaient sorti de son livre et qu'il avait vu l'heure. Moins de quinze minutes avant l'extinction des feux, et il n'avait pas encore eu le temps de récupérer une partie de ses affaires avant de se trouver une chambre.

Se levant du canapé dans lequel il s'était installé après le repas, il s'était joint au reste des habitants qui créaient un petit bouchon sur les marches et l'entrée du balcon qu'il avait mis beaucoup trop longtemps à atteindre. Demain il s'y prendrait plus tôt. Plus que cinq minutes, mais il ne pouvait pas non plus bousculer tout le monde. Le temps de repasser par sa chambre, marchander avec les actuels occupants pour prendre vêtements et brosse à dents et il restait moins d'une minute. À peine le temps de voir "3-E" avant que la lumière ne s'éteigne et il s'était empressé d'entrer et de refermer derrière lui. D'entendre le cliquetis typique d'un verrou alors qu'il se retrouvait face aux ténèbres. Clignant un instant des paupières histoire de faire disparaître les derniers restes de lumière de ses rétines, sans y voir mieux pour autant. Aussi sombre que la vaste majorité de sa mémoire, et ça n'était pas vraiment agréable de se retrouver face à face avec un autre vide. Il y a quelqu'un?

Fermant les yeux, plus pour se concentrer qu'autre chose, il avait tendu l'oreille. Je peux vous entendre... C'était faible mais bien là, un frottement de tissu, quelque part devant, mais aurait été bien incapable de savoir si ça appartenait à une personne ou à plusieurs. Il ne savait même pas combien de chambres comptait ce logement, le E dans sa section - où était sa chambre originelle d'ailleurs - en comptait trois. 006? 123? Même si les concernées auraient certainement reconnu sa voix et se seraient signalées. Au delà d'elles... Il devait avouer qu'il n'avait pas vraiment rencontré grand monde, ou assez pour retenir un numéro. Preuve qu'il était donc capable de se fondre dans la foule pour le moment, même si d'autres connaissances ne lui feraient certainement pas de mal. Je veux bien jouer à Colin-Maillard mais ça risque de pas être agréable si je vous trouve. Et il avait environ huit heures pour le faire, vu que les horaires n'avaient pas été modifiées avec cette histoire de chambres.

HS: @H02-523 on te pique ta piaule pour la première nuit des chambres musicales, si t'as quelque chose de compromettant planqué quelque part ou que t'as oublié de prendre c'est le moment de le dire What a Face

Il était assis tranquillement avec son livre sur l’un des canapés de l’espace salon. La bibliothèque lui apportait finalement bien plus de connaissances sur lui-même que tous les instants de réflexion qu’il avait pu avoir dans son lit au moment de l’éveil de la ruche. Les premiers jours y avaient été particuliers, il s’était rendu compte de son appétence pour les livres épais, lourds et avec des titres qui nécessitaient plus d’une ligne. Ce nouveau monde qui s’ouvrait à lui le réjouissait, il l’arrachait de sa routine. Depuis ce moment-là, ouvrir un livre et le feuilleter en attendant que le psychique de son corps lui transmette une sensation était devenu un jeu très agréable.

Un jeu qui s’arrêta quand il tomba sur ce gros bouquin. Il était assez récent et traitait de notions psychologiques de base. 22 s’était rendu compte qu’elles lui étaient très familières et il avait maintenant l’impression d’explorer son for intérieur.

Néanmoins, sa lecture fut perturbée par une nouvelle qui l’étonna.
A son annonce, il se leva, jeta un œil autour de lui. La majeure partie des habitants regardaient l’écran et une bonne partie de ceux qui ne le faisaient pas semblaient préoccupés. Quelques personnes restaient assises calmement, d’apparence, autour de lui. Parmi elles, une carrure sortait du lot, un homme, grand, musclé, chauve.

Mais 22 n’attarda que quelques instants son regard sur lui, il devait allait chercher ses affaires dans sa chambre. Ce n’est qu’au moment de les rassembler qu’il réalisa qu’il n’avait que peu d’affaires personnelles, elles prenaient moins de place dans ses bras que son livre. Il se dirigea vers le couloir et cria : 020 ? Tu es là ? Mais le logement semblait vide.
Quand il sortit sur le balcon, il n’était pas le seul avec des affaires dans les bras, d’autres habitants avaient pris les devants et cherchaient maintenant un endroit où passer la nuit. D’un coup d’œil rapide, il chercha 006 ou 020, les visages connus. Mais aucune des deux n’était dans les parages. Il pesta dans ses dents et changea radicalement de section.

Il dut ouvrir deux ou trois portes avant de trouver un logement vide. Il s’y engouffra et ferma aussitôt la porte. Le logement dans lequel il était n’avait pas la même configuration que les autres logements qu’il avait entre entre-aperçu. Il fit le tour du propriétaire et mit du temps avant de se rendre compte qu’il était prévu pour deux personnes. Il s’installa dans une des chambres et reprit sa lecture, il ne savait pas qu’elle heure il était, ni combien de temps il lui restait.

Lorsqu’il se déconnecta de son livre, il fut presque sûr qu’il ne lui restait que peu de temps avant la fermeture des lumières, il le posa sur la table de chevet et se hâta vers la salle de bain, prit sa brosse à dents et commença à se laver les dents. Je vais être seul pour cette nuit, c’est ce que je voulais … mais finalement je ne sais pas si c’est une bonne idée, pensa-t-il.

Puis il cracha l’eau dans l’évier.

Le bruit qui en résultat l’étonna quelque peu.

Et la lumière ne fût plus.

Il sursauta quand il entendit quelqu’un lui parler. Dans un premier temps il resta silencieux. C’était donc le bruit de la porte, comment j’ai fait pour ne pas le reconnaître … quel idiot, pensa-t-il. La personne parla de nouveau et il se concentra pour essayer de reconnaître sa voix, dans tous les cas ce n’était pas une femme. Et puis il entendit le nom, ou plutôt le matricule, de 006 ce qui eut comme effet de le rassurer.

Son interlocuteur était de l’autre côté de la porte. 22 prit la parole en faisant coulisser la porte : Ah, si vous connaissez 006, alors …

Mais il n’eut pas le temps de terminer sans phrase, car son pied rencontra quelque chose. Et il n’eut pas le temps de s’avoir si c’était ou non, le petit orteil du monsieur inconnu qui venait de lui voler sa chambre.

「 all i know is a door into the dark 」

How terrible this darkness was, how bewildering,
and yet mysteriously beautiful

feat. H02-22

Connaître n'était pas le verbe qu'il aurait employé pour 006. Elle était la première à lui avoir adressé la parole et lui avait expliqué certaines choses, mais de là à dire qu'il la connaissait... Compris un peu son fonctionnement oui, le reste était un mystère, comme tout le reste au final. Il s’apprêtait à le préciser quand quelque chose avait heurté son pied, plus particulièrement son orteil. De surprise, sa senestre s'était abattue sur le mur le plus proche alors qu'il retenait un cri de douleur, tout son corps monumental se tassant dans le coin opposé à l'endroit d'où venait le coup. Réaction peut-être un peu exagérée, mais elle lui semblait normale dans cette situation encore inédite pour lui: aucun souvenir de s'être heurté le petit orteil quelque part, et une toute première expérience de cette douleur unique et persistante. Il en avait même une petite larme qui coulait au coin de l’œil. C'est extrêmement douloureux de mon côté. Un simple constat, sans aucune animosité, pour cette nouvelle première fois dont il avait fait l'expérience. Qu'il ne comptait pas reproduire de sitôt. Une inspiration pour chasser les derniers fourmillements qui s'attardaient et il s'était détendu, soulagé au passage que ses vêtements aient survécu à la crispation soudaine. Même s'ils étaient plongés dans le noir, il n'avait aucune envie d'être moins habillé que prévu devant un inconnu.

Inconnu avec qui il allait passer la nuit en plus. Autant qu'il ne le reste pas longtemps, vu les circonstances. Je suis H02-379. Mais ce n'était qu'un numéro parmi les dizaines qui allaient et venaient dans la Ruche chaque jour, et pas vraiment le meilleur moyen d'être identifié par l'autre homme. Il existait en revanche une manière bien plus efficace de lui permettre de se présenter. Le chauve très grand et très large. Il ne prêtait pas vraiment attention aux regards qui détaillaient parfois sa stature colossale - à l'exception d'un peut-être - ça ne les empêchait pas d'être là, mais au moins il était certain que tout individu de la Ruche l'avait au moins une fois détaillé des pieds à la tête. Compliqué de faire autrement quand on voyait le morceau, en écho à la pensée qu'il avait à chaque fois qu'il croisait son reflet dans le miroir. Pas étranger, mais pas familier non plus. Sûrement une conséquence du vide qu'était encore sa mémoire. Et vous êtes? À part celui qui venait de lui shooter dans le pied et l'actuel propriétaire de cette chambre, au moins pour la nuit.

Tâtonnant à sa gauche, il retrouva le mur et décida de le suivre. Si cette chambre était comme la sienne, du moins celle dans laquelle il s'était réveillé et avait dormi jusqu'au changement de règle, la voix provenait de la salle de bain, ce mur était celui de l'une des chambres et en le suivant il tomberait sur l'espace salon. Il y a d'autres gens ici? Histoire de savoir si je dois m'attendre à d'autres attaques sournoises ou pas... Il n'avait pas réfréné le grand sourire qui fendait son visage, même si personne ne le voyait. Ça lui apprendrait à oublier de remettre ses chaussures, et il pouvait s'estimer heureux que ça n'ait pas été plus douloureux. La main collée au mur, il le suivit jusqu'au coin, puis de l'autre côté, juste le temps de heurter ce qui devait être le bord d'un canapé, au bruit que ça avait fait. Jusque là c'était comme dans sa chambre de départ, ses deux colocataires en moins. Désolé de m'imposer, j'avais complètement oublié le changement de règle. Ça et le fait qu'il avait préféré laisser des places beaucoup plus proches de sa chambre originelle à d'autres, jusqu'à la dernière minute. Bien sûr il aurait pu s'imposer, de ce qu'il avait vu des habitants de la Ruche peu étaient capables de lui tenir tête physiquement, mais il n'était pas comme ça. Sans qu'il sache d'où pouvait venir cette certitude.

Compte tenu de la réaction de son interlocuteur, il y avait de grandes chances qu’effectivement, ce soit son orteil. Il allait s’excuser quand l’homme continua de parler. Un grand très chauve ? Très large ? Il n’avait pas de doute il l’avait déjà vu. Qui pouvait ne pas le voir en même temps ? Il frissonna, certes il ne donnait pas l’impression d’être hostile mais sa forme physique lui permettait aisément de soulever 22 d’un bras et d’un seul. Le fait d’être enfermé seul avec un homme de sa puissance, inconnu qui plus est, pouvait être inquiétant.

Mais 22 se sentait bien, malgré sa première impression, sans qu’il ne puisse savoir si cette sensation lui venait d’un jugement positif envers 379, d’un courage inouï de sa part ou tout simplement du manque du jugement (il espérait surement secrètement que la deuxième proposition soit la bonne).

Je m’appelle … enfin, m’appelle … je suis H02-22, répondit-il. Je ne suis pas aussi reconnaissable que vous par contre, je suis brun, de taille moyenne, j’ai des cheveux assez longs et une barbe. Bref, pas vraiment de signes distinctifs ici !

Il attendit une réponse qui ne venait pas, il avait entendu des bruits de pas mais impossible de savoir vers où l’homme se dirigeait et pour quelles raisons. Quand 379 reprit la parole, il était surement à quelques pas de sa dernière position et 22 prit l’initiative de la rattraper.

Non, à vrai dire j’avais choisi cette chambre pour ça, il n’y avait personne quand je suis arrivé, dit-il. Après je ne vais pas vous cacher, j’ai lu pendant une bonne partie de la fin de soirée et je n’étais peut-être pas le plus attentif des hommes.

Ses sourcils se froncèrent, certes il ne se sentait pas en danger mais un soupçon de bon sens lui venait. Un homme qui rentre comme ça dans votre chambre à quelques minutes du couvre-feu, c’est au mieux un heureux hasard, au pire, intentionnel. Le colosse donnait l’impression d’être franc quand il disait avoir oublié le changement de règle, mais comment oublier quelque chose qui avait fait le tour des écrans toute la soirée. Qui plus est, il avait fait plusieurs chambres, prit son temps … On aurait pu le suivre.

Il sentait que le silence se faisait pesant, sa tranquillité l’avait quitté et il sentait son cœur s’emballer. Il essaya de faire le moins de bruit possible et se déplaça dans le couloir, à l’endroit qu’il imagina être entre les deux portes des chambres. Il imaginait son interlocuteur dans le salon mais il ne savait pas à quel endroit précisément. Il rompit le silence, plus pour montrer une apparente sérénité que pour donner à l’armoire de muscle sa position.

Je vous ai vu lire tout à l’heure. Plaisir ou recherche personnelle ? J’ai cru comprendre que beaucoup de gens sont à la bibliothèque pour autre chose que du loisir, c’est votre cas ?

En parlant il s’appuya doucement contre le mur et posa sa main un peu plus en retrait pour vérifier que la porte était à l’endroit auquel il espérait. C’était le cas.

Et si jamais vous venez d’un logement comme le mien, de trois personnes, je peux peut-être vous aider, disons que si vous avez une envie pressante, il vaut mieux savoir où sont les toilettes.

Et il attendit une réponse, un peu inquiet de la configuration, du handicap d’être à l’aveuglette comme de l’avantage que ça pouvait représenter en cas d’agression.

Sujet: Re: All I know is a door into the dark - ft. H02-22

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