Can you feel the pressure? || Feat. NB04-963

Poum. Poum. Poum. Poum. Poum. Le rythme est régulier. Tel un métronome. Mon cœur suivant le rythme de mes pas sur le tapis. Un pas, un coup, un pas, un coup. La santé me semble donc bonne, sans doute. Pas que c'est ce que je cherchais à tester, mais toute information est bonne à prendre. Le néant. C'est ce qui me tient encore compagnie malgré les nombreuses journées écoulées. Le vide. C'est ce que j'essaie de combler, mais ne sais pas de quelle façon m'y employer. Rapidement j'ai trouvé les points de repère des services essentiels, si ainsi on peut les désigner. Trouvant de quoi activer mon esprit, de quoi noter le fil de mes pensées. Le sport était assurément ma dernière priorité après avoir mangé. Retissent que j'étais à glisser de la nourriture de source inconnue entre mes lèvres trop sèches du manque de liquide. Une journée enfermé. Une journée à essayer de comprendre et méditer. Puis cette prison qui s'était dessinée pour que je puisse la découvrir et réaliser à quel point le néant continuerait de me bercer. L'inconnu. Le doute. La crainte même de ne pas avoir de réponses à tant de questions pressées en mon esprit. Poum. Poum. Poum. Poum. Poum. Le tapis me fait oublier, me concentrer sur ce point fixe que j'observe face à moi. Blanc. Toujours ce blanc. Il me donne le rythme de mes pensées que je ne sais pas comment apaiser jusqu'à ce que je me stoppe. Le souffle court. Le corps trempé. Je retrousse mes manches en une vaine tentative de refroidir un peu ma chaire. Dévoilant de ce fait les marques couvrant mes avant-bras. Les traits. Ceux dont la signification me semble évidente et que pourtant je n'arrive à comprendre. Comme le reste. Comme cet endroit. Elles sont nombreuses, non régulières et semblant venir en lot de deux ou trois. Assurément je suis celui qui les a creusé. Ça me semble être une évidence dont je n'arrive à me soustraire.

Un soupire m'échappe et je descends du tapis pour aller trouver les altères. Fixant les marques à mes bras que j'effleure du bout des doigts comme si elles allaient me parler. Comme si elles allaient m'expliquer. Le silence si pesant ne trouvant comme seule réponse que mon souffle commençant doucement à se calmer. Je fixe les altères, cherchant lequel prendre en main pour tester la force que je ne me connais pas. Cet endroit étant l'hôte de toute les premières fois. Je teste, les soupèse, cherchant celui qui sera le plus approprié sans réellement savoir ce que je fais sur la finalité. En prenant un au hasard que j'arrive à tenir dans ma main pour aller m'asseoir sur le banc. Je le pose près de moi, mes mains se glissant dans mon visage un instant. L'adrénaline descendant en mes veines. Le choc de l'esprit reprenant son droit acquis. Les pensées qui remontent. Le focus qui se perd. La frustration qui se taille une place de choix en mon être. Ce blanc, tout ce blanc. Inspire. Expire. Inspire. Expire. Il faut que je sorte de cet endroit. Je sens mon visage rougis, bouillant. Me disant qu'il faudrait sans doute que je mange quelque chose avant de m'effondrer. M'effondrer... Peut-être est-ce la solution qui pourrait fonctionner. M'effondrer et ne plus me relever. M'effondrer et espérer être ailleurs, loin, lorsque mes yeux s'ouvriront de nouveau.

La pression me semble énorme, démesurée. La pression d'arriver à tenir le coup. La pression de faire confiance. La pression de vivre. La pression de survivre. Elle semble peser sur mes épaules comme ce poids pèsera sans doute dans ma main lorsque je me déciderai à le soulever. Lorsque je trouverai la motivation de le faire. Jugeant préférable de laisser mon esprit se concentrer sur la douleur plutôt que les pensées. Est-ce la raison de toutes ces marques à mes bras, mes cuisses? Est-ce parce que je ne savais comment arrêter ma tête de tourner? Suis-je réellement excessif au point de juger bon de me blesser pour arriver à contenir le flot de mes pensées? Ça ne me semble en rien être la meilleure façon de le faire. Sans doute avais-je mes raisons. Sans doute comprendrais-je un jour lorsque l'envie se fera sentir de le refaire. À moins que je ne sois ici pour cette raison. Dans cet asile aux allures de prison plus sophistiquée à attendre que les hommes en blancs viennent me subtiliser à ce paradis improvisé lorsque la médication commencera à s'évaporer. Quoi d'autre alors que je m'étais senti si las. Si nauséeux. Si mal. Quoi d'autre alors que tout de cet endroit hurle une familiarité que je n'arrive à nommer. Que chaque réveil est ponctué d'un nouveau frisson de dégoût que je n'arrive à contenir. D'une impression de déjà vu qui me donne envie de hurler. Moi pourtant si calme et discret depuis mon arrivé. L'envie de hurler y est pourtant. L'envie de hurler que la surface de cette glace que je sens se fissurer sous mes pieds sans savoir comment l'arrêter.

Le rouge à mes joues semble chercher à s'estomper. La chaleur à mon visage diminuer. Mes cheveux trempés me collant au front alors que mon regard trouve un point fixe. Ne levant les yeux qu'en entendant quelqu'un sembler me parler. Je lève les yeux. Fixe cet inconnu qu'il ne me semble pas avoir croisé auparavant. Comme la majorité des gens évoluant en cet endroit sur lesquels mon regard ne s'attarde jamais réellement de trop. Bien trop coincé dans mes pensées que je suis pour les remarquer. J'essuie mon front du revers de ma manche avant de lui répondre. « Quelques jours à peine. » Répondis-je avant de reporter mon regard sur l'altère près de moi. Me demandant si je ne dois profiter de la discussion déjà amorcée pour essayer de gratter quelques informations ailleurs qu'en de futiles constatations. « Tu es-là depuis longtemps? » Mon regard le retrouve. Le fixe dans les yeux sans une once de gêne. Sans chercher à le fuir. Sans chercher à l'observer davantage non plus. Le reste ne m'intéresse pas. Les informations m’intéressent bien davantage. Et bien au-delà du besoin de savoir depuis combien de temps les gens sont ici, il y a le besoin de savoir si manger est réellement une bonne idée. Certes j'ai déjà demandé, mais qui sait. C'est dans la nature humaine de se complaire dans les mensonges, je n'en doute pas. Plusieurs avis sont donc mérités sur un sujet aussi délicat que la survie en cet endroit. Même si oui, l'envie d'en partir les pieds devant me traverse l'esprit parfois.

« Tu as mangé? La nourriture est appréciable? » Je trahis une faiblesse certaine, une absence de nourriture dans le corps, mais je m'en moque. Mon apparence ne m'importe pas davantage que la sienne. Ce que je renvoi pas davantage que ce qu'il transpire. Je veux juste savoir. Je veux juste comprendre. Je veux juste penser. Demandant franchement sans filtrer davantage. Laissant ma langue glisser contre mes lèvres gercées.