LA VIE C NUL \\ LIBRE

un gémissement s'arrache à ma gorge. ça me fait mal, je grimace. ça aussi, ça me fait mal. ce qui me fait gémir. le cercle vicieux des enfers. je sens mes dents qui grincent les unes contre les autres en protestations, ma tête me semble sur le point d'exploser.
j'inspire profondément. je commence par me concentrer sur mes doigts de pied, que je parviens à remuer, et je remonte le long de mon corps, étape par étape, organe par organe. quand j'arrive aux intestins, je sens mon ventre gronder. j'ai l'estomac vide, ce qui ne fait rien pour arranger mon état général. quand j'arrive au coeur, j'ai la gorge qui se serre. une bouffée d'angoisse me prend quand je me concentre sur le rythme régulier de mon palpitant, ce qui ne fait rien pour arranger mon état général. quand j'arrive aux yeux, je les ouvre.
ça non plus, ça ne fait rien pour arranger mon état général : la lumière soudaine m'aveugle en négatif, un blanc lumineux tangue devant moi. elle ne semble pas diminuer d'intensité non plus, ce qui m'interloque. la surprise me donne la force de me redresser : tout est blanc. je fronce les sourcils en posant les pieds au sol. tout est blanc et aveuglant, beaucoup trop lumineux, et vide.
c'est le tunnel, et la lumière au bout. je m'apprête à avancer pour la rejoindre, bien que je ne parvienne pas à déterminer de direction à suivre, quand une voix résonne, venue de nulle part. je n'arrive même pas à comprendre ce qu'elle dit : elle m'effraie. je la fuis, je cours malgré la nausée qui me donne des haut-le-coeurs, malgré mon souffle court.

y a quelqu'un ? aidez moi !

le cri m'échappe. je pensais que la mort, ce serait vachement plus paisible que ça. qu'est-ce que j'ai foutu pour qu'un fichu robot se retrouve à devoir m'indiquer les étapes à suivre ? me dites pas que le chemin vers l'afterlife est une bureaucratie, sinon je me tire une balle. ce qui n'aura pas d'effet si je suis déjà mortx... ben dis donc, je suis pas sortix de l'auberge.

@NB01-13

LA VIE C NUL

Cinq jours. Cinq longs jours. Cinq jours qu'il est coincé ici dedans. 111 avait fini par avoir raison de sa chemise laide, de son pantalon laid, de ses chaussettes laides et de ses chaussures laides. Si ses vêtements n'étaient clairement pas à son goût, il faisait toujours de son mieux pour rendre sa gueule présentable. Il se rasait correctement, il se coiffait du mieux qu'il le pouvait avec le nécessaire à sa disposition. Il n'aimait pas particulièrement la bouffe. En réalité, il se rendait compte qu'il devait être difficile à vivre dans la vraie vie. Coquet, difficile en nourriture, il fallait savoir y faire avec lui. Sa seule occupation, quand il n'était pas dans le petit salon en train de discuter avec ses colocataires bizarres, était de faire du sport avec des gens bizarres. Tout le monde avait l'air chelou entre ces murs blancs. Ils avaient tous l'air de fous enfermés dans un asile psychiatrique. Heureusement, transpirer lui faisait du bien. Et puis, il avait croisé cette fille, qu'il aimait bien suivre. La seule qu'il ne trouvait pas chelou et qui lui faisait un drôle d'effet. Tout son corps le poussait à aller vers elle, sans qu'il ne comprenne pourquoi.

Ce jour-là, ce jour du 5e jour, il s'était un peu perdu dans les couloirs des logements à vrai dire. Il ne l'aurait jamais avoué à qui que ce soit, mais c'était bien le cas.
Tout à coup, il aperçut une personne au bout du couloir. Elle courait comme une dératée. 111, perdu physiquement et mentalement face à la situation dans son esprit nébuleux, ne s'écarta pas de son chemin et la percuta de plein fouet. Putain. Le front le premier jour, une claque forcée le cinquième, quand est-ce que la malchance finirait de lui tomber sur la gueule ?
Un peu sonné, il s'était retenu au mur pour ne pas tomber.
-Putain de merde, grogna-t'il en se tenant le nez. Ca va pas ou quoi ? Calme-toi bordel !
Il était mis de mauvaise. Bah oui, fallait pas foncer dans 111 comme ça sans raison et sans s'excuser comme un fou.
-Tu pourrais t'excuser sérieux !
On touchait pas à son joli minois. Il décolla sa main de son nez et y découvrit des tâches de sang. Mais quelle belle cinquième journée.

HS:

AVENGEDINCHAINS

mes yeux ne parviennent pas à se focaliser sur ce qui m'entoure, si bien que je ne distingue aucun mur, aucune direction, aucune silhouette. je ne perçois que le choc, sourd, brusque, chaud. instinctivement, je porte la main à mon front comme si cela pouvait faire cesser le mal de crâne lancinant qui s'éveille, comme si cela pouvait m'ancrer à la réalité, comme si cela pouvait donner du sens à ce que je vis. j'ai les oreilles qui sifflent, l'écho de ma propre voix qui me parvient aux tympans, et l'aboiement simultané qui se mêle à ce vacarme :
putain de merde ! ça va pas ou quoi ? calme-toi bordel !
je me dis que, me calmer, cela semble être une bonne idée. mais parallèlement, mon cerveau enregistre les jurons qui se déversent les uns à la suite des autres : qui que soit cette personne, si tant est que ce soit une personne et pas un autre automate, elle a une drôle de manière d'exprimer son calme et de me le transmettre. je fronce les sourcils quand la voix ajoute :
tu pourrais t'excuser sérieux !
quoi ?
l'exclamation m'échappe. je dois avoir l'air de protester, mais la vérité, c'est que je ne comprends rien du tout.
m'excuser pour quoi ? on est où ? tu es qui ? je suis quoi ?
les questions se déversent tandis que la grimace se répand sur mon visage : j'ai mal partout, le crâne qui tambourine, le cœur qui veut sortir et la respiration courte. c'est nul, la mort, purée.

@H01-111 $LA VIE C NUL \\ LIBRE 607404586$

@NB01-13

LA VIE C NUL

111 était d'une humeur particulièrement exécrable ce jour-là, et ça n'était pas près de se calmer. Il lançait un regard foudroyant à la personne devant lui qu'il n'avait, jusque là, même pas encore pris le temps d'observer. Il était tellement centré sur lui-même qu'il n'avait pas vu débarquer cet inconnu sorti de... Nulle part. En paniquant et en hurlant. 111, de toute sa vanité, n'avait pas jugé bon de se décaler, il s'était dit que cette personne folle ferait le taff et l'éviterait. Mais ça n'avait pas été le cas.
Il essuya la goutte chaude qui coulait de son nez. Vu la traînée rouge sur son index, c'était du sang. Elle l'avait pas loupé, la miss au crâne rasé. Et elle rétorqua instantanément à 111 ce qui n'était pas pour lui plaire. Puis, elle balança tout un tas de questions à 111 qui n'avait pas réponse à la moitié.
-Déjà, de m'être rentré dedans, grogna-t'il dans toute sa mauvaise foi.
Il se massa le haut du nez. Il avait pas l'air pété, c'est déjà ça.
-On est dans un endroit chelou. J'suis H01-111. Ils ont cru que j'étais con alors ils m'ont foutu que des 1 comme matricule. Et toi j'en sais rien. Ca te va comme réponse ?
Puis, il prit une grande inspiration nasale qui lui remit les idées en place. Elle venait d'arriver. Pour être aussi paniquée et poser autant de questions, c'est qu'elle était nouvelle dans le game. Et 111 se souvenait parfaitement de ce que ça faisait d'être parachuté dans un endroit comme celui-ci sans aucun souvenir de sa vie précédente. A vrai dire, il avait vécu ça il y a cinq jours. Encore heureux qu'il se souvenait de ce que ça faisait.
-Attend, tu viens d'arriver ? demanda-t'il dans un éclair de clairvoyance et un élan de compassion soudain.

AVENGEDINCHAINS

déjà, de m'être rentré dedans.
oh. pardon.
j'ai les yeux écarquillés, je fixe son nez ensanglanté. qu'est-ce qu'il se passe ? pourquoi il saigne, si on est morts ? pourquoi j'ai mal, si je suis mortx ? j'ai le coeur qui tambourine dans les tympans et la nausée qui monte, qui monte, qui monte. je ne sens plus mes jambes, je crois que je suis à deux doigts de m'évanouir, ou, en tout cas, de tomber de tout mon poids par terre. mes muscles ne tiennent plus qu'à la force de mes nerfs. pourquoi j'ai autant de réactions physiques, si je suis mortx ? pourquoi rien ne fait sens ? pourquoi je ne me rappelle de rien ? est-ce que je devrais me souvenir de la façon dont je suis décédé, au moins ? le choc de cette rencontre ne fait rien pour m'aider, les informations se croisent sans s'arrêter une seule seconde afin de faire sens, rien qu'un peu de sens.
On est dans un endroit chelou. J'suis H01-111. Ils ont cru que j'étais con alors ils m'ont foutu que des 1 comme matricule. Et toi j'en sais rien. Ca te va comme réponse ?
je fronce les sourcils. de nouveau, ma bouche forme des mots avant que je ne réalise, avant que je ne le lui ordonne, et mes cordes vocales vibrent, le son résonne dans mon crâne, lance la migraine déjà installée.
non ça me va pas !
et je tombe, badaboum. je le savais, il y a quelques secondes seulement je m'étais dit que mes jambes allaient céder, mais je suis incapable de la moindre réaction, je suis incapable d'analyser et d'agir, je ne fais que subir les assauts de mes réactions physiques en chaîne. je m'écrase au sol, aux pieds de l'individu qui s'est présenté comme h01-111. j'ai peu de souvenirs, mais ça me parait bizarre, comme nom. je n'ai aucun souvenir, mais je sais malgré tout qu'on ne s'appelle pas par des numéros, normalement. la vie après la mort ressemble de plus en plus à une bureaucratie, et une pas très bien faite de surcroît. la liste de mes réclamations s'allonge d'instant en instant.
Attend, tu viens d'arriver ?
je lève le nez vers lui. sa voix a changé d'intonation et il me regarde d'un air différent. je pousse sur mes mains pour me redresser et je m'assois par terre, les jambes écartées, en regardant l'affraux pantalon gris que j'ai enfilé je ne sais quand ni comment. c'est moche.
je ne sais pas. je suis arrivae où ? qu'est-ce qu'il se passe ? je pensais que la mort serait plus paisible.
la dernière phrase m'échappe dans un souffle tandis que mes épaules s'affaissent. l'adrénaline, ou quoi que ce soit qui m'a fait réagir jusque-là, a quitté mon système. je me sens épuisae, perdux. je veux seulement dormir.

@h01-111 :peggy:

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LA VIE C NUL

Elle était totalement paniquée. Elle répondait à 111 avec véhémence et ne savait plus où donner de la tête. En même temps, le latino n'était pas des plus rassurants. Au contraire, il s'était lui aussi emporté quand elle lui était rentrée dedans violemment par inadvertance. Certes, il manquait de bonne foi et de douceur, mais il n'était pas méchant au fond. Juste très maladroit et malchanceux. Il se demandait s'il lui arrivait d'être aussi à côté de la plaque dans la vraie vie, ou c'était juste le fait qu'il soit totalement déboussolé et sans repère dans cet endroit étrange.
Elle s'est écroulée. Ses jambes tremblantes n'étaient pas parvenues à soutenir le poids de son corps plus longtemps. Avec un temps de retard, il avait voulu la retenir, mais trop tard. Elle était déjà par terre. Elle le regardait d'un air incompris, depuis le sol, comme un enfant qui ne comprendrait pas un adulte. Il avait de la peine pour cette nouvelle arrivée, 111. Il s'en voulait presque d'avoir été aussi méchant avec elle au premier abord. Elle le questionna sur son arrivée, sur l'endroit, sa raison d'être ici. Elle pensait être morte. Ca, il ne le croyait pas. Cet endroit avait beau être étrange, il ne s'était jamais imaginé mort pour autant.
Rempli d'une compassion nouvelle, 111 s'assit par terre aux côtés de la fille sans cheveux.
-T'es pas morte. Fin je crois pas. J'y crois pas.
Il soupira. Lui aussi, il aimerait des réponses à toutes ces questions. Celles que tout le monde se pose. Mais il ne les avait pas. Comme tout le monde ici.
-On est des dizaines ici. On a tous débarqué comme toi, il y a quelques jours, quelques semaines. Sans souvenir de nos vies d'avant.
Il étendit lui aussi ses jambes au sol et posa ses mains légèrement derrière lui pour garder appui.
-Je te l'accorde, c'est hyper flippant. Mais on finit par s'y faire, t'inquiète, tenta-t'il pour la rassurer en accompagnant ses mots d'un geste de la main.

AVENGEDINCHAINS

T'ES PAS MORTE. FIN JE CROIS PAS. J'Y CROIS PAS.
En même temps, si on est bel et bien morts, ça ne serait pas étonnant que certains soient dans le déni par rapport à ça. Cette absence de souvenirs ne m'empêche visiblement pas d'avoir des certitudes, visiblement.
ON EST DES DIZAINES ICI. ON A TOUS DÉBARQUÉ COMME TOI, IL Y A QUELQUES JOURS, QUELQUES SEMAINES. SANS SOUVENIR DE NOS VIES D'AVANT.
Alors je décide que c'est un purgatoire. Nous devons passer des épreuves qui détermineront où nous passerons l'éternité qui va suivre. Je me demande quel est le système en place, et ce qui fait que notre place n'a pas été déterminée avant notre mort. Peut-être que nous sommes touz des gens qui posent problème ? Je n'ai pourtant pas la sensation d'être quelqu'an qui fait des vagues. Si je dois être jugæ, ce serait bizarre d'avoir modifié un tel de caractère. Un instant je m'interroge : qui serait juge, dans cette affaire? Dieu, le mot m'apparaît. Je ne sais pas si, de mon vivant, je croyais en un Dieu tout-puissant, mais maintenant que je suis au Purgatoire, force est d'admettre la réalité de ce modèle. On va m'envoyer soit au Paradis soit en Enfer et j'ai mal commencé mon épreuve puisque je suis rentræ dans une personne et lui ai fait saigner le nez. En plus, je crois que je n'ai pas été aimable, dans ma confusion.
jE TE L'ACCORDE, C'EST HYPER FLIPPANT. MAIS ON FINIT PAR S'Y FAIRE, T'INQUIÈTE.
Je hoche la tête, pas convaincux pour un sou. Mais je suppose que s'il est dans le déni, c'est pour une bonne raison. Le détromper ne ferait que lui faire du mal, inutilement. Il a l'air gentil. Il a un joli visage. Il me sourit après s'être installé par terre à mes côtés alors je lui souris en retour.
h01-111, tu as dit? C'est bizarre comme nom, nan? Je crois...
Je fronce les sourcils et je grimace, concentræ. J'essaie de me souvenir de la voix qui m'a réveillæ. Mais impossible de savoir quel matricule on m'a attribué dans ce Purgatoire bureaucratique. Pff, je devais pas croire en Dieu, parce que maintenant que j'y crois, ça m'embête grave.
mon nom à moi, c'est ce que la machine a dit quand je me suis réveillæ?

@"H01-111"

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LA VIE C NUL

La nouvelle arrivée opinait de la tête. Elle était déboussolée. Un peu comme tout le monde lors des premiers jours dans cet endroit étrange. Normal. Pas de quoi faire tout un plat. Enfin, si. Parce que ça serait bien d'en sortir un jour de ce trou à rats. Donc, si, il faut en faire tout un plat. Il faut se soucier, se renseigner, s'écouter, se conseiller, manigancer... Percer les mystères de la ruche... Comme ce plancher qui craque. 111 y avait déjà laissé traîner ses pattes mais aucune lumière divine n'avait éclairé son cerveau embrumé à la recherche de ses souvenirs. Il n'était pas le seul, d'ailleurs, à avoir tenté. Mais jusqu'à maintenant, tous s'étaient soldés d'un échec.
Elle observait 111, lui demanda de confirmer son matricule. Il hocha la tête.
-Ouais c'est chelou. J'ai pas pu choisir malheureusement. 'Fin, même si j'avais pu choisir, je sais pas ce que j'aurais pris au final, déclara-t'il en riant.
A force de penser à voix haute, il finissait par en dire des bêtises. Mais bon, ça n'était pas nouveau.
Puis, son interlocutrice lui demanda si c'était bien ce que la voix lui avait dit en se réveillant, son matricule. Encore une fois, il acquiesça.
-Exact.
Et 111 se rendit bien compte qu'elle n'avait pas souvenir de ce que cette voix mystérieuse lui avait annoncé. En même temps, c'était normal. Vu comme elle avait déboulé au milieu du couloir, il imaginait bien qu'elle n'avait pas pris le temps d'écouter son joyeux discours de bout en bout.
-T'en fais pas. Elle te refera ton briefing tous les matins. Tu finiras bien par t'en souvenir un d'ces quatre.
Il poussa un soupire en soulevant les épaules, malgré lui.
-Tu verras. Les petites habitudes du quotidien s'arrangent vite ici bas. Finalement, je crois que je suis content de me souvenir de rien. Ca me ferait chier de me rappeler ce que ça fait que de respirer de l'air frais.

AVENGEDINCHAINS

'Fin, même si j'avais pu choisir, je sais pas ce que j'aurais pris au final.
je hoche la tête, songeuxe. effectivement, ce n'est pas évident de se prénommer soi-même quand on n'a pas la moindre idée de qui l'on est. ce serait comme demander à un bébé de choisir son prénom à la naissance. c'est pas pour rien que c'est les parents qui en sont responsables. même si, je crois que bien que les parents ne font pas toujours des choix très judicieux. je fronce les sourcils. pourquoi je pense ça ?
je secoue la tête et reviens à l'instant présent. cent-onze confirme mon hypothèse et je m'inquiète soudainement : je n'ai pas la moindre idée du numéro que la machine m'a attribué. j'ouvre la bouche et m'apprête à partager mon inquiétude au jeune homme mais il me devance. il semble avoir deviné la source de mon trouble et me rassure rapidement.
-T'en fais pas. Elle te refera ton briefing tous les matins. Tu finiras bien par t'en souvenir un d'ces quatre.
ouf !
pourquoi ouf ? pourquoi cela me soulage-t-il ? je fronce les sourcils, décidément perturbæ par la situation. quelle valeur morale peut-il y avoir à connaître son numéro de dossier ?
Tu verras. Les petites habitudes du quotidien s'arrangent vite ici bas. Finalement, je crois que je suis content de me souvenir de rien. Ca me ferait chier de me rappeler ce que ça fait que de respirer de l'air frais.
je considère ce qu'il me dit, hébétæ. je dois avoir l'air stupide, les yeux dans le vide, assix par terre, après avoir débouler en hurlant. je finis par murmurer quelques mots.
cent-onze... je crois que j'ai peur.
je m'accroche à lui comme à une bouée de sauvetage. le sang bat fort dans mes tempes et je cligne des yeux de manière insistante pour ne pas me laisser divaguer et sombrer dans l'inconscience. trop de chocs en un temps réduit. les réactions chimiques dans mon cerveau s'enchaînent trop vite et mon corps contrecarre cela comme il le peut. ça fait mal au ventre.
je ne sais pas ce que c'est, l'air frais.
les mots n'ont aucun sens. ce n'est pas ce que je voulais dire. et en même temps, si : moi, je ne crois pas que l'air frais va me manquer. mais bon, je ne suis arrivæ qu'il y a quelques minutes, je n'en sais trop rien encore. pourquoi le purgatoire ressemble-t-il tant à une prison ? peut-être me suis-je trompæ, peut-être suis-je déjà en enfer. cela expliquerait pourquoi nous n'avons aucuns souvenirs : la peur liée à l'inconnu constitue une excellente punition.
je sens des larmes me monter aux yeux et commencer à dévaler la pente de mes joues, sans que je ne puisse réagir.

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LA VIE C NUL

La nouvelle sembla d'abord rassurée par les explications de Javier. Logique, il ne la voulait pas à mal. Il voulait simplement entamer une discussion sur ses derniers constats de ses journées ici. En parler à coeur ouvert, ça faisait un bien fou. Il se sentait plus léger, de lui confier ce genre de petites choses toutes bêtes. Ce genre d'interaction lui faisait du bien, à ce Javier en manque de contacts humains.
Puis, elle finit par lui murmurer quelques mots. Elle avait peur. Alors intrigué, il tourna la tête vers elle. En effet, elle n'avait pas l'air bien. Quand elle compléta ses ressentis en disant qu'elle ne savait pas ce que c'était l'air frais, Javier se mit à regretter. Eh merde. Il l'avait fait flipper en parlant de tout ce qui lui semblait le plus normal du monde. Mais en même temps, tout le monde était un peu déboussolé en arrivant à la ruche. Certains criaient, d'autres pleuraient, et certains comme Javier s'étalaient par terre en panique. D'autre, comme elle, déboulaient dans les couloirs en courant sans se soucier de ce qui les entoure jusqu'à rentrer dans quelqu'un. La nouvelle avait une foule d'émotions qui parcouraient son corps, sa tête, son coeur, et déjà les larmes se mettaient à rouler sur ses joues. Allez Javier, il était temps pour toi de rattraper tes conneries.
-Merde ! Mais moi aussi je sais pas ce que c'est !
Ou plutôt, il ne savait plus. Détail. Il se rapprocha d'elle posa une main réconfortante sur son bras.
-C'est toujours flippant, d'arriver ici. Je sais de quoi je parle.
Il essayait de la rassurer, mais Javier était plus doué pour amuser la galerie que pour être réellement sérieux en disant des choses censées du début à la fin.
-Tu verras, on s'y fait, c'est pas si terrible.
Mensonge. Si. C'était terrible. Mais il fallait voir les choses en face: ils avaient un endroit où dormir de confortable de quoi se laver, de quoi manger à leur faim et de quoi s'occuper le corps et l'esprit. La plupart des besoins nécessaires de l'être humain étaient réunis là... Cela rappela à Javier une certaine pyramide qu'il avait dû voir en fouinant dans les trésors de la bibliothèque. Il retournera y accorder un oeil un de ces quatre.
-Je suis une merde pour rassurer les gens. Faut pas m'en vouloir. Mais je sais que ça ira bien pour toi.

AVENGEDINCHAINS

plus il parle, plus je pleure. c'est comme s'il actionnait un robinet : les larmes me paraissent plus grosses et elles coulent de plus en plus vite, si bien que j'ai bientôt les lèvres salées, les joues mouillées et le nez qui coule. sans grande cérémonie, j'essuie la morne du bout de la manche de ma chemise, remarquant par la même occasion que je suis vêtux des mêmes vêtements que cent-onze. pour une raison que j'ignore, ça me réconforte un tout petit peu, comme une satisfaction dont je ne comprends pas la source. pour autant, ça ne m'arrête pas dans mon pleurnichage.
jusqu'à sa dernière phrase.
Je suis une merde pour rassurer les gens. Faut pas m'en vouloir. Mais je sais que ça ira bien pour toi.
là, j'éclate de rire. c'est saugrenu, ça n'a aucun sens. les yeux mouillés, le nez dégoulinant, assix par terre comme an enfant, je me mets à rigoler en me pencher contre l'épaule du jeune homme. les larmes reviennent mais elles n'ont plus le même goût : je suis partix en fou-rire. je n'arrive plus à me contrôler et je ris et je pleure jusqu'à en perdre mon souffle. au bout de longues secondes, je commence à retrouver mon calme, je m'essuie tout le visage de mes manches et je relève le nez vers mon compagnon d'infortune.
je crois que je suis aussi une merde pour rassurer les gens. et pour être rassuræ.
je lui lance un grand sourire.
mais t'es plus doué que tu le penses. je me sens mieux.
et c'est vrai. j'imagine que les larmes et le fou-rire hors de contrôle ont agi comme une relâche sur mon système nerveux. toutes mes émotions, la peur, la confusion, même l'instinct qui me pousse à chercher à comprendre : tout a disparu. je me sens plus légære d'un coup. je range mes jambes, m'installant face à cent-onze, les fesses sur mes pieds, à genoux sur le sol inconfortable. pour la première fois depuis notre collision, je regarde autour de nous. je me rends enfin compte que nous sommes sur un espèce de balcon, et j'identifie d'autres gens.
tu... veux bien me faire une visite?

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LA VIE C NUL

Elle n'arrêtait pas de pleurer. Ca lui brisait le coeur à 111. Il n'aimait pas voir les gens dans des états pareils. Il faisait toujours tout pour faire le pitre à côté d'eux et ainsi les revoir sourire. Parfois, ce n'était même pas voulu. Il était simplement maladroit et naïf sur les bords, ça l'aidait à lui donner cet air de clown sympathique qui aimait épater la galerie de par ses blagues un peu bête.
Cela sembla fonctionner sur la nouvelle. De pleurs, elle passa aux rires en quelques instants. 111 sourit bêtement lui aussi. Elle avait l'air bien plus cool comme ça. Elle essuya tous ses déboires du revers de sa manche de chemise moche, comme toutes celles de la ruche, et fit écho à 111. Elle le complimenta même.
-Oh. Euh. Cool, répondit-il pris au dépourvu, se grattant la tête.
Comme elle allait mieux, elle prit enfin le temps de regarder ce qui l'entourait. Elle se questionnait. Ca se voyait dans son regard. Bientôt, elle demanda à 111 si il pouvait lui faire une petite visite guidée des lieux.
-C'est clair !
Il se releva et tendit une main à la nouvelle pour l'aider à se relever.
-Là, on est sur les balcons. Il y en a plusieurs et c'est là que se trouvent les chambres où on dort.
Il fit lui fit signe de la suivre, s'approcha de la rambarde où il s'y appuya pour avoir une vue d'ensemble sur toutes les abeilles qui bourdonnaient en contre-bas dans les locaux communs.
-Et là, c'est les lieux communs. C'est là qu'on va manger, rencontrer des gens, se dépenser, ou lire. Ou faire des conneries. Mais faut pas faire de trop grosses conneries d'accord ? C'est pas trop autorisé ici.

AVENGEDINCHAINS

il se redresse et me tend la main. j'hésite un instant : je n'ai pas envie de lui mettre de la morve dessus. alors j'observe mes mains, et je lui tends celle qui a l'air la plus propre, en prenant soin de relever la main avec laquelle je me suis essuyæ. avec son aide, me voilà debout. je lui souris doucement pour le remercier. non seulement pour ce geste, mais parce qu'il prend le temps de me parler, d'essayer de me rassurer quant bien même il a l'impression de ne pas être doué pour cela. parce que même si son premier réflexe a été de me crier dessus - et, après tout, quand on vient de se prendre quelqu'un dans le nez, c'est assez logique, me semble-t-il - il a vite changé d'attitude et qu'il s'est montré bienveillant. je crois même qu'il a fait des efforts. je ne suis pas surx de mériter que l'on fasse des efforts pour moi.
Là, on est sur les balcons. Il y en a plusieurs et c'est là que se trouvent les chambres où on dort. j'ai une chambre, moi ? demandé-je en trébuchant maladroitement sur mes propres pieds. je me rends compte à cet instant que j'ai de longues jambes et que je ne sais pas bien m'en servir. j'observe le sol un peu trop longtemps, ne relevant le nez que quand cent-onze reprend la parole. Et là, c'est les lieux communs. C'est là qu'on va manger, rencontrer des gens, se dépenser, ou lire. Ou faire des conneries. Mais faut pas faire de trop grosses conneries d'accord ? C'est pas trop autorisé ici. je le rejoins et m'appuie comme lui à la rambarde avant de laisser mon regard embrasser le paysage qui se trouve devant nous. j'en reste bouche bée. y a plein de gens... je reste là, immobile, à observer les individuz qui vivent en bas. als n'ont pas l'air trop malheureux. peut-être qu'après le coup de flippe que j'ai eu, ça va aller de mieux en mieux ?
je relève un regard plein d'espoir vers cent-onze. c'est... ça a l'air chouette ? j'hésite malgré tout, j'attends confirmation. après tout, il n'a pas lui-même eu des mots si positifs que ça à l'égard de l'endroit où l'on se trouve. tu es là depuis longtemps ? et tous ces gens ? c'est qui ? bizarrement, la foule en contre-bas m'intimide. tout à coup j'ai envie de me faire tout petitx et de disparaitre sous une couette. peut-être est-ce un test de mon courage ? eh bien, je décide que je ne suis pas courageuz. et tant pis si cela fait un mauvais point pour moi. l'idée d'être courageuz fait bien trop mal au ventre et j'en ai marre, d'avoir la nausée. alors je chasse toute velléité à la bravoure et j'attends que cent-onze me réponde. j'attends qu'on me prenne la main et que l'on me guide. surtout, en pas faire un pas de travers. surtout, ne rien faire qui puisse attirer l'attention.
tel est mon premier instinct.

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