Experience || ft. F01-903

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Ça commençait à bien faire de se réveiller dans des pièces inconnues. Non, vraiment, ça devenait incroyablement redondant et 903 détestait la sensation de perte de contrôle total qu'elle avait dans ces moments là. Comme lorsqu'elle arriva dans cette maudite ruche, elle entendit une voix féminine, mais elle se rendrait bien vite compte qu'elle n'avait rien à voir avec Aleksa, pour une fois, et à son plus grand bonheur. Et l'odeur était différente...

903 ouvrit lentement les yeux. Pas besoin de s'adapter à la lumière, il n'y en avait presque pas. Battant des cils un instant, elle finit par se focaliser sur la tâche claire qu'elle percevait non loin d'elle. C'était une jeune fille. Elle ne savait pas si l'obscurité cachait certains traits de son visage, ou si elle ne la connaissait résolument pas. Rien qui ne lui inspirait confiance... Mais depuis qu'elle était arrivée, elle n'avait pas vraiment eu de soucis avec ceux habillés comme elle, alors elle ne fut pas plus méfiante que d'habitude...
Par contre, cette pièce... reprenant peu à peu ses esprits, 903 commença à se lever, ayant encore le réflexe de partir, mais se heurta le haut du crâne. Que... c'était quoi ce plafond super bas ?? Elles étaient dans une boîte à chaussures ou quoi ? Cela ne lui disait rien qui vaille. Se tenant le crâne à deux mains, elle ferma fort les yeux jusqu'à ce que la douleur passe.

Les rouvrant, elle remarqua enfin la tablée romantique au milieu de cet enfer. Ça sentait affreusement bon, mais elle n'osait pas découvrir ce qu'il y avait sous ces cloches pour autant... Tout ça était bien trop suspect. Et sa partenaire avait l'air bien trop absorbée par la prétendue nourriture.
« C'est quoi ce bordel, encore ? J'ai jamais vu cet endroit, là... » c'est vrai qu'elle ne saurait dire à quel endroit de la ruche elles se trouvaient... si elles s'y trouvaient encore. Mais son instinct lui disait que c'était le cas. « C'est une blague, c'est pas possible... » un dîner aux chandelles, c'était quoi cette mascarade ? Ça changeait des machines distributrices de bouffe, hein. « C'est... c'est un piège... » vraiment, elle avait l'impression que les gens derrière tout ça n'étaient que des sadiques offrant du fromage à leurs souris de laboratoire. Mais pourquoi feraient-ils ça ? 903 avait beau sentir son ventre gargouiller, elle n'avait aucune intention de participer à ce cirque.

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« Nous sommes peut-être grondées ? Non, ça ne fait aucun sens… pourquoi avoir une table en plein milieu. » 903 leva un sourcil. "Grondées" ? Elle avait quel âge, 12 ans ? Et puis, pourquoi elles seraient punies ? Le dernier souvenir qu'elle avait, c'était de s'être endormie dans son lit, normalement. Elle ne pensait pas avoir commis une quelconque infraction du règlement débile, ou alors ils avaient fini par deviner qu'elle le violerait tôt ou tard, car il lui tapait sur le système de jour en jour. Sa partenaire, en tout cas, continuait les suppositions. « Nous sommes malades et mises en quarantaine, peut-être ? » Elle la regardait comme si elle pouvait lui donner une réponse. Bah... est-ce qu'elle était une ancienne addict comme elle ? Mh... peut-être mais alors pourquoi ne pas se retrouver ici avec 626 ou 234 ? Peut-être qu'ils étaient enfermés aussi quelque part, après tout...

« Avec ces vitres teintées, je suis sûre qu'on nous observe davantage. C'est un test, pas un piège. » Les mots de la blonde lui donnèrent un frisson de dégoût. Purée, c'était possible ça oui... elle n'avait pas remarqué tout de suite, mais le sol, les murs et le plafond où elle s'était cognée (ça faisait toujours un peu mal, d'ailleurs) étaient entièrement vitrés. Mais sombres. Des vitres teintées. Ew. « Un endroit étroit, une table avec chandelle, deux filles… » Ugh, elle n'avait pas besoin d'en dire plus. Malheureusement pour les éventuels voyeurs, 903 n'était pas vraiment attirée par les filles. À sa connaissance.

Lorsque sa partenaire ouvrit son plat, l'odeur alléchante se répandit davantage dans toute la pièce. C'était presque impossible d'y résister, en tout cas, pas longtemps... 903 s'efforça d'avaler la salive qui se formait dans sa bouche. « C'est encore chaud… et d'ici quelques heures, on va sûrement mourir de faim. » Elle n'aidait pas à résister, ça c'est clair... « Je suis certaine que tout va bien se passer. Ils ont tout fait pour qu'on survive jusqu'à présent. Ils nous ont tout donné. Je n'ai pas peur de manger ce repas. » Attends... QUOI ?!! Elle était soudainement tombée sur la tête, elle avait raté ce moment ou quoi ? 903 s'avança (enfin se glissa, plutôt) jusque vers elle, la regardant comme si elle était folle (ce qu'elle pensait, justement). « Ils nous ont tout donné ?! Comment t'arrives à parler de ceux qui nous ont emprisonnés là-dedans ? Ils nous maintiennent en vie, c'est tout, et encore... » Pourquoi des gens disparaissaient par exemple ? C'était tout sauf de la bienveillance tout ça. « Et puis tu l'as dit toi-même : on dirait une mise en scène pour qu'un pervers se rince l’œil en nous matant. Qui te dis qu'il n'y a pas quelque chose dans cette bouffe ? »

903 n'osait même pas y penser... se faire droguer par de la nourriture pour faire des choses qu'elle n'aurait jamais fait sobre... c'était l'enfer... C'était juste... dégueulasse. Mais c'est vrai qu'elle avait faim... que ça sentait bon... et qu'elle avait envie de voir ce qu'il y avait sous sa cloche à elle... la même chose ? Elle avait déjà attrapé le couvercle avant même d'y réfléchir. Du boeuf... des pommes de terre... des carottes. « Spezzatino... » murmura-t-elle sans s'en rendre compte.
Enfoirés... ils avaient fait exprès... ? 903 connaissait ce plat. L'odeur était remplie de nostalgie, sans pour autant avoir les souvenirs qui correspondaient. Mais elle savait ce que c'était. Elle en avait mangé et elle avait adoré ça. Peut-être que c'était même son plat préféré. Un sentiment de grande mélancolie l'envahit... des éclats de voix familiers mais lointains résonnaient dans son esprit... elle arrivait à se souvenir d'une chaleur particulière, l'espace d'un instant. Quand elle reprit ses esprits, 903 se rendit compte que des larmes avaient coulé sur ses joues. Honteuse, elle s'empressa de les essuyer du revers de sa manche. Elle se sentait tellement humiliée, utilisée. Elle ne toucherait pas à une portion de ce maudit plat...

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Mais elle se prenait pour qui, celle-là ? Son ton et son attitude passive-agressive lui tapait sérieusement sur les nerfs. Si en plus c'était pour débiter des idioties pareilles... « Ils nous ont donné un toit, ils nous ont nourri, nous avons des passe-temps, nous sommes vraiment libre de faire ce qu'on veut, malgré deux-trois petites choses sans intérêts. Alors oui, je préfère être enfermée ici plutôt qu'une prison où nous devons nous entre-tuer pour survivre ! » 903 serra les poings et la mâchoire. C'était vraiment pas croyable ! Elle était obligée d'avoir une case en moins pour lui sortir ça, et énormément d'audace. Elle ne put s'empêcher de réagir au quart de tour.
« Et pourquoi on devrait être enfermés, hein ? Dis-moi, si on est pas en prison, pourquoi on ne peut pas sortir d'ici ? Pourquoi on doit respecter toutes sortes de règles au risque de disparaître ? Pourquoi on nous explique pas pourquoi on est là ? » la nervosité la faisait trembler à nouveau. Il fallait dire que la blonde avait mis le doigt sur quelque chose qui tenait à cœur à 903. Qu'elle lui fasse la morale sur la pseudo-liberté de cette endroit, ça lui donnait envie de vomir. « C'est la première fois que je croise quelqu'un dans le déni comme ça... ou bien... » elle n'était pas des leurs. C'est vrai ça... elle ne l'avait jamais croisée avant, cette fille. Et elle défendait cet endroit. Peut-être qu'elle faisait partie de ceux qui les manipulaient et qu'elle était en train de lui tendre un piège. En voulant la ramener dans son camp au passage. Eh ben, elle se mettait le doigt dans l’œil.

« Tu crois que c'est ce qui nous arrive aussi ? Que nous sommes comme ces personnes qui disparaissent de temps en temps ? » 903 eut un mouvement de recul et se contenta de hausser les épaules, ne quittant pas la fille du regard. Elle n'avait pas du tout confiance en elle, et il n'était pas question qu'elle baisse sa garde. Pas question de mettre de côté la possibilité qu'elle jouait double jeu. « Et si c'est notre dernier repas ? » en fait, il fallait juste qu'elle arrête de parler. Soit elle l'énervait, soit elle la stressait. C'était vraiment hyper désagréable.
903 ne put s'empêcher de baisser le regard sur son repas. Ça aurait du sens... vu qu'elle le connaissait, ce plat. Elle ne voulait pas y penser davantage au risque de se remettre à pleurer devant la blonde. Tout sauf ça.

« Ils vont attendre longtemps pour se rincer l'œil. Aussi charmante que tu es, je ne crois pas que ce sera possible entre nous. » 903 se retint très fort de lever les yeux au ciel. Ah bah là, c'était clairement pas envisageable. « Oh non, quel dommage... » rétorqua-t-elle sans cacher la moindre once de sarcasme.
Elle était exécrable, elle s'en rendait compte. Mais elle commençait à détester le fait d'être enfermée avec elle. On ne pouvait pas dire qu'elle lui avait fait une bonne première impression. « Et s'il y a de la drogue dans mon repas, j'ai confiance que tu ne tenteras rien. » non, par contre 903 s'inquiétait qu'elle lui fasse une crasse si elle, en revanche, en mangeait.

Parce que c'était dur de résister... ça sentait si bon... et ça lui rappelait tellement de choses. Comme si des souvenirs se mélangeaient à l'odeur. Une grande nostalgie. Un pays. L'Italie ? C'était le sien ? Peut-être... peut-être pas... elle ne savait pas trop. Mais elle avait un lien avec ça, elle en était certaine... Plus d'une fois, elle avait failli prendre un des couverts pour le plonger dans une pomme de terre. Mais elle sut résister à ses pulsions à chaque fois. Venant d'une ancienne alcoolique, elle était plutôt fière d'elle. Mais si ça avait été de l'alcool... est-ce que ça aurait été la même... elle ne préférait pas y penser.

« Si tu as besoin de parler, je suis là pour t'écouter. » Ah, oui, c'est vrai, elle avait pleuré... Mais elle ne lui permettrait pas de faire sa gentille avec elle. Non merci. Essuyant les dernières larmes qui n'avaient pas séché, 903 secoua la tête en guise de réponse négative. Avant de tendre la main pour désigner le repas en face de la blonde.
« Mais je t'en prie, ne m'attend pas ! Fais donc honneur à ceux qui nous nourrissent si bien ! » elle fit retomber lourdement son bras, fixant la fille d'un air agacé, presque défiant. Si par miracle elle ne faisait pas partie de l'ennemi, alors peut-être qu'une bonne leçon lui ouvrirait enfin les yeux sur ce qu'était vraiment cet endroit.

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